Tribune : Réponse d’une europragmatique à un eurobéat – par Sophie Rauszer

Sophie RAUSZER (LFI), ancienne candidate de la circonscription du Bénélux. ©Stéphane Burlot

Le député de la circonscription du Benelux, Pieyre-Alexandre ANGLADE (LREM), affirmait récemment « Entre postures souverainistes et discours pro-européen, il n’existe pas de juste milieu ». Sophie RAUSZER (LFI), ancienne candidate au second tour face à lui, lui répond.

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« Entre postures souverainistes et discours pro-européen, il n’existe pas de juste milieu ». Je vous accorde largement ce point.  La question européenne dépasse le clivage droite/gauche mais recouvre bien davantage la tension entre peuple d’un côté – dont on a ignoré le coup de semonce en 2005- et oligarchie de l’autre, avec des représentants qui se complaisent dans un Européisme béat refusant d’établir tout rapport de force. La seule solution européenne, c’est le respect des souverainetés populaires. Cela suppose d’arrêter de se cacher derrière une illusoire souveraineté européenne pour mieux faire passer en force des décisions contraires aux intérêts des peuples européens. Plutôt que d’attendre la constitution d’un mirifique peuple européen, construisons des solidarités de fait.

Vous prolongez le cauchemar européen. L’Europe de votre majorité, c’est la continuation de l’Europe du pire : renoncement sur les perturbateurs endocriniens, supercherie sur les travailleurs détachés, bâillon du peuple français sur le CETA… Les réformes du marché du travail et de l’(in)justice fiscale en étaient les premiers signaux d’alerte. Vous avez suivi à la lettre les « recommandations » de la Commission européenne dans son Semestre européen : baisse des dotations aux collectivités locales, poursuite du Pacte de responsabilité de Hollande, hausse de la TVA dans le logement social, etc. En mai 2016, elle regrettait le « peu de flexibilité pour les employeurs de dévier des accords collectifs par branche ». Vous avez ajouté la touche finale à la réforme El Khomri.

Avec la question du drapeau européen, nous avons posé la première pierre. Outre le symbole religieux excluant de fait une large partie des citoyens européens, Macron poursuit ici la politique de ses prédécesseurs et son jupitérisme caractéristique. Il piétine la ratification du traité de Lisbonne par le Parlement français qui excluait la déclaration annexée sur les emblèmes.

Plus personne n’est dupe. Le mot « pro-européen » ne cache plus la réalité. Une Europe néolibérale sauvage et brutale contre les moins favorisés. Relancer un projet à bout de souffle autour de l’armée et de l’argent : qui peut y croire ?  Près de 4 millions de jeunes européens au chômage (un jeune sur deux en Grèce), 13 millions de travailleurs pauvres en Allemagne et une Union passoire du dumping social et fiscal. Ce sont là les batailles à mener.

Bref, il y a ceux qui continuent l’Europe du pire et il y a l’Europe Insoumise. Le Plan A, c’est les réformes profondes dont l’Europe a besoin : harmonisation par le haut des salaires minimaux, politique monétaire au service de la relance durable, taxe écologique et sociale aux frontières de l’Union européenne, moratoire sur les extractions fossiles. Madame Merkel n’en veut pas ? La France lance la dynamique, l’opère sur son territoire et offre son soutien aux États qui voudraient s’engager sur la même voie. C’est le Plan B. Je note qu’après moult tergiversations, c’est finalement la position que vous adoptez pour le glyphosate en l’interdisant prochainement sur le territoire national. National. Encore un petit effort et vous serez souverainiste !

Photo :
©Stéphane Burlot