Planet of the humans : comment Michael Moore peut-il tomber si bas ?

Le documentaire Planet of the humans de Jeff Gibs – produit par Michael Moore – a suscité la polémique dans le milieu écologiste. Et pour cause, c’est un vaste plaidoyer contre les énergies renouvelables, sélectionnant des exemples à charge partout aux États-Unis. Si ce film a le mérite de poser des questions importantes sur les nombreux problèmes que posent des technologies – les énergies renouvelables – quand elles sont mal utilisées, il est néanmoins empreint de nombreux dénis de réalité. La critique qui suit vise ainsi à mettre en lumière les points étrangement laissés dans l’ombre, souligner les aspects intéressants – sur la mise en lumière de réseaux de “greenwasheurs”, notamment – et finalement montrer qu’il faut savoir dissocier technique et politique. Les énergies renouvelables sont non seulement fonctionnelles, mais essentielles. Par contre, certaines technologies renouvelables posent plus de problèmes qu’elles n’en résolvent, ce que le film montre bien, alors que d’autres sont en revanche largement acceptables, ce qu’il ne montre pas. Il faut donc sortir de tout manichéisme, car seul un pragmatisme à toute épreuve peut nous permettre de relever le défi de la transition écologique.


 

Planet of the humans (ici en accès libre sous-titré en français) cumule 6 millions de vues en moins de deux semaines, et suscite d’emblée des réactions étranges : il fait jubiler à la fois la droite climatosceptique, les tenants du business as usal fossile, les partisans du tout nucléaire et les plus cyniques des « collapsos ». Un tel axe de soutien met la puce à l’oreille. La collapsosphère se réjouit toujours des mauvaises nouvelles, a fortiori quand on évoque des « solutions », terme qui vient heurter directement ses certitudes quant à un effondrement “inéluctable”. Or nous sommes dans une époque particulièrement égotique, où l’on se réjouit intérieurement que rien ne puisse atténuer la catastrophe en cours, puisqu’on la prêche depuis toujours et que l’important c’est d’avoir raison. Le déni qui s’en suit logiquement vis-à-vis des « bonnes nouvelles » est particulièrement puissant, et résiste souvent à la démonstration rationnelle.

Avec la crise que nous traversons, l’idée de reconstruire un monde d’après résilient et neutre en carbone est devenue consensuelle dans nos milieux. Ce documentaire arrive à point nommé pour distiller du doute dans nos rangs et donc aider le camp d’en face, celui du retour à « l’ancien monde ». Il arrive à contretemps, alors que les faits démontrent que la transition énergétique est plus que jamais opérationnelle et que seul le verrou politique l’empêche de se concrétiser. Salir prend moins de temps que nettoyer, et un article ne permet pas d’aller dans le détail. Néanmoins, la mauvaise foi est assez facile à démontrer, tant le documentaire est biaisé. Le biais principal est de montrer seulement ce qui confirme sa thèse. Ce genre de biais est pardonnable si la conclusion nuance le propos et ouvre sur des pistes qui relativisent. Ce n’est aucunement le cas ici, la conclusion est d’ailleurs encore plus problématique que le reste.

– D’un point de vue général, une distinction fondamentale que le documentaire ne fait pas vraiment est celle entre technologie et gestion de la technologie. L’utilisation des énergies renouvelables à des fins de profit crée plus de dégâts que ce qu’elles sont censées épargner. Du côté constructeur, parce qu’on retrouve les phénomènes classiques de la course au profit capitaliste : on va faire des panneaux solaires à durée de vie courte car peu qualitatifs, 10-20 ans, des éoliennes de 10 ans à peine. Il faut néanmoins souligner que la norme constructeur est désormais – pour le solaire – de 25 ans de durée de vie garantie en moyenne en Europe. D’autre part, les avancées technologiques en matière solaire sont extrêmement rapides. C’est désormais l’énergie la moins chère au mégawatt installé – et au mégawatt heure. On me répondra à raison que le facteur de charge induit de quintupler le mégawatt installé pour que la comparaison avec d’autres sources d’énergie soit pertinente. C’est vrai si l’on est dans le déni vis-à-vis des progrès en matière de stockage – ce dont le film ne parle pas. Pourtant, les technologies sont déjà là, elles sont multiples et aucune n’est parfaite, mais certaines sont très acceptables : batteries redox (dont le liquide est inerte) pour l’électrochimique, hydrogène pour le stockage sous forme de gaz et la synthèse d’hydrocarbures « renouvelables », graphène pour l’électrostatique, sans parler des milliers de formes de stockage physique (eau, air comprimé…). Si ces formes de stockages sont pour certaines déjà utilisées et concurrentielles, d’autres présentent un coût élevé – qui peut néanmoins baisser en augmentant les échelles. Dès lors, c’est une question de choix politique. L’intermittence est de moins en moins un problème, surtout si l’on couple stockage et smart grids (réseaux intelligents qui optimisent la consommation des appareils en fonction de la production). De tout cela, le documentaire ne parle curieusement pas, alors que c’est fondamental.

– Du côté exploitant, des énergies renouvelables aussi mal gérées que celles montrées dans le film, sur un réseau qui n’est pas transformé pour, impliquent évidemment un recours systématique aux énergies fossiles pour compenser. Aux États-Unis, il s’avère que le profit et l’image publique priment sur un quelconque but écologique. Seul l’effet d’annonce intéresse les personnages mentionnés dans le film. Mais cela, ce ne sont pas les énergies renouvelables : cela s’appelle le capitalisme et le cynisme en politique.

– Sur le solaire, le documentaire montre, avec le cynisme caractéristique des productions de Moore (d’habitude bienvenu), l’exemple de cette petite centrale, à peine capable d’alimenter 10 foyers alors qu’elle recouvre un terrain de foot. Efficacité des panneaux : 8 %, et seulement quand ils marchent. Avec cette technologie, il faudrait une surface de plusieurs km² pour alimenter une petite ville – et encore, par beau temps. Il faut, pour fabriquer ces panneaux, du quartz, du silicium… et beaucoup de charbon. Mais ce que le film oublie de dire, c’est que nous sommes désormais en 2020. Les panneaux conventionnels approchent les 20% d’efficacité pour une quantité de matériaux bien moindre. Les progrès en la matière obéissent presque à une… loi de Moore[1]! Les prix qui se sont effondrés le montrent. En 2009, le MWh solaire coûtait en moyenne 179 dollars US contre environ une quarantaine aujourd’hui, et la tendance se poursuit. Scoop : il faut de l’énergie grise (énergie consommée pendant le cycle de vie d’un produit, lors de la fabrication, de l’entretien, du recyclage, etc.) pour les produire – comme pour… tout. On ne parle étrangement jamais de l’énergie grise qu’il faut pour fabriquer des chaudières charbon ou des réacteurs nucléaires. On pardonne à Nicolas Sarkozy ses truanderies mais pas à François Fillon, car ce dernier disait vouloir incarner la morale. De même, parce qu’on dit énergie « propre » pour les renouvelables, les détracteurs montreront du doigt ce qu’ils qualifient d’incohérence, parce que tout n’est pas propre. Or, en termes d’énergie, il n’y a pas de morale, juste des arbitrages à réaliser en fonction de ce qu’on juge acceptable ou pas pour l’environnement vis-à-vis de nos besoins. Investir de l’énergie grise – qui elle-même peut être décarbonée à terme – pour fabriquer des énergies renouvelables, c’est un moindre mal. Des pistes prometteuses de technologie solaire efficaces sur de très fines couches de matériaux basiques voient le jour en laboratoire. Il ne tient qu’à la puissance publique d’encourager la recherche et de pousser l’échelle de production. Pas un mot sur ces pistes dans le documentaire. Pas un mot non plus sur une solution simple pour pallier le besoin de surface : utiliser les surfaces inutiles comme les toits.

– Le solaire par concentration serait assimilable aux centrales à gaz, pour le réalisateur Jeff Gibs. En fait, les techniques diffèrent. Les plus grandes fonctionnent grâce à des sels fondus – qui amènent la chaleur pour la vapeur des turbines – qui doivent monter très haut en température pour fonctionner, à grand renfort de gaz pour le lancement. L’avantage présumé est l’inertie thermique qui permet de continuer à produire un peu le soir. Mais d’autres centrales, plus petites, fonctionnent avec des sodiums moins chauds et n’ont pas besoin de gaz. Elles produisent un peu moins longtemps, mais c’est sans doute déjà mieux, y compris pour l’entretien. Le problème de beaucoup de ces faramineux projets, c’est qu’à la moindre crise financière (ou changement d’avis/mauvaise opération financière des acteurs), les financements nécessaires à la finalisation des installations ou l’entretien peuvent s’évanouir. C’est ce qui est arrivé en Californie, mais également pour le projet Desertec au Sahara, qui avait fait couler beaucoup d’encre à l’époque. Seul le Maroc, qui a mis la main sur la gestion de certains projets initialement Desertec, fait tourner efficacement ses centrales à concentration (Noor I et bientôt II) et le pays en est très satisfait. Pas de gaz utilisé ici. Là encore, le documentaire ne montre pas ce qui marche.

– Sur l’éolien, il est mentionné l’énorme consommation en métal et béton, et les pâles qui tombent en désuétude rapidement. Ce sont là de vrais problèmes que le documentaire fait bien de montrer. Mais encore une fois, il y a éolien et éolien. Lorsque les entreprises dealent avec des pouvoirs publics corrompus, cela donne ce genre de scandales : à grands coups de subventions, des éoliennes sont installées, on s’en vante publiquement, on montre aux citoyens que l’on se soucie du climat, mais certaines ne sont ni entretenues ni parfois même… branchées au réseau. Même si des progrès sont réalisés sur les économies de matériaux et l’optimisation de la production des générateurs, il faut encadrer scrupuleusement leur déploiement là ou elles sont vraiment utiles dans les terres, mais a fortiori au large des côtes par exemple, et en flottant si possible car il faut prendre en compte l’acceptabilité sociale. Les consortiums privés ont quant à eux intérêt à en planter le plus possible, partout, sans prendre de responsabilité sur la suite, même si en la matière on note des progrès. Le Portugal, le Danemark ou encore l’Écosse, pour ne citer qu’eux, témoignent pourtant d’immenses succès en matière d’éolien, décarbonant sérieusement leurs mix énergétiques. Il n’y a aucune raison objective pour que la France ou les États-Unis fassent moins bien. Pas un mot sur les exemples qui marchent dans le documentaire – ce n’était pourtant pas compliqué à trouver ! Néanmoins, le potentiel éolien est globalement moindre que le solaire, mais malheur à ceux qui oublie que la résilience, c’est cultiver une biodiversité de solutions en même temps. Dans le scénario négaWatt – quoi qu’on en pense -, le nombre d’éoliennes (à technologie actuelle !) dont la France devrait disposer en 2050 n’est que de trois fois ce que nous avons actuellement, c’est moins que l’Allemagne aujourd’hui. Pas de fantasmes donc, rien de trop problématique.

– Sur la biomasse, le documentaire montre le bien les scandales environnementaux, et détricote avec brio le greenwashing que cela recouvre. Les centrales à bois sont une hérésie, et ne pourront jamais remplacer l’efficacité des fossiles, de la biomasse dont l’énergie a été concentrée pendant des millions d’années. Il faut oublier la substitution des fossiles par de la biomasse pour de la production électrique centralisée. Néanmoins, des petits incinérateurs consommant des déchets peuvent être intéressants pour produire directement de la chaleur. Et au niveau individuel, ceux qui ont un poêle à granulés savent très bien que c’est d’une très grande efficacité économique pour chauffer une maison. Or les granulés peuvent êtres produits facilement, à base de déchets végétaux et sciures, et les volumes nécessaires pour ne posent pas de soucis. Il faut y mettre le prix, mais c’est très optimisé, donc tolérable.

La biomasse aussi doit être abordée non pas comme un tout, et les postures morales qui l’accompagnent, mais avec discernement. Quand elle est en concurrence avec des terres agricoles ou naturelles, c’est intolérable. Si elle provient de déchets agricoles, pour faire du biogaz par exemple, c’est déjà plus tolérable. Les algues sont par ailleurs une excellente piste, dont l’évocation dans le documentaire est lapidaire. Il s’agit de cultiver du kelp (pas de l’arracher dans la nature), dont la matière sèche est à moitié composée d’huile. Les algues n’ont pas les mêmes contraintes que les plantes terrestres, elles poussent 10 fois plus vite, désacidifient et rafraîchissent les eaux alentour grâce à la photosynthèse, abritent une faune riche, etc. À grande échelle, c’est une solution majeure pour décarboner les carburants notamment, première source de consommation pétrolière en France. Une excellente filière pour reconvertir à la fois la pêche industrielle et les raffineries pétrolières.

– La fin du documentaire est problématique. Si Moore ne tombe pas dans “l’impasse Pitron” – du nom de Guillaume Pitron, coréalisateur du film documentaire Le côté obscur des énergies vertes et qui fait comme si les énergies renouvelables devaient remplacer le volume énergétique actuel alors qu’une transition digne de ce nom est justement de le diviser par un facteur trois (scénario negaWatt) – il avance sur une ligne de crête dangereuse, en mentionnant la démographie à de nombreuses reprises. On sait ici ce que ce genre de chose sous-entend, mais puisque Moore n’est pas d’extrême droite, que ses convictions sociales sont sincères, on ne lui fera pas un procès en malthusianisme. À force de répéter que c’est un tabou, la démographie apparaît pourtant comme le problème principal, sur lequel « on nous mentirait ». Sans rentrer dans les détails, ce sujet n’est nullement un tabou pour des écologistes humanistes conséquents : il faut éduquer massivement dans les pays du sud (a fortiori les petites filles : plus leurs études sont longues, moins elles font d’enfants), massifier la prévention/contraception, et surtout réduire notre empreinte à nous, car ce sont bien les classes moyennes consuméristes qui sont en surpopulation écologique. Un Tchadien ne consomme que 0.3 planète. Le documentaire ne soulève pas ce point essentiel, s’alignant avec les arguments des pires réactionnaires américains.

– Dans un monde qui consomme 3 fois moins d’énergie, les difficultés liées aux énergies renouvelables ne se posent pas de la même façon. Dans un monde qui investit dans le recyclage systématique des métaux, la maximisation de l’efficacité (adieu les SUV…) et la sortie du consumérisme, pas de problèmes de matières premières pour les énergies renouvelables : elles sont déjà dans les objets et machines inutiles qui nous entourent.

Sans une vision holistique, une sortie par le haut n’est pas envisageable. Or il ne peut y avoir de vision holistique si l’on refuse de voir. Les partisans du business as usual (nucléaire compris) – et ceux qui aimeraient que leurs thèses effondristes se vérifient – ne veulent pas voir que le vrai problème des énergies renouvelables tient en 9 lettres : POLITIQUE.

La transition énergétique n’a jamais été aussi faisable, et aussi urgente. Mais elle doit être conduite avec discernement. Difficile d’imaginer discernement et course au profit compatibles, l’énergie est une chose trop sérieuse pour la laisser aux marchés. Elle doit être gérée – ou contrôlée – par la puissance publique et les citoyens. Avec Gaël Giraud et Nicolas Dufrêne, nous avions produit une note sur comment financer cette transition. Spoiler : l’argent n’est pas un problème. Le problème, c’est bien de faire comprendre aux gens que l’obstacle, ce sont les lobbyistes et les dogmes politiques. En France, trop nombreux sont ceux – qui auront j’en suis sûr adoré le documentaire – qui veulent réduire la question énergétique au domaine du technique, en assommant leur auditoire de chiffres curieusement sélectionnés et d’un ton péremptoire sidérant (suivez mon regard…).

Ce film pose de bonnes questions mais refuse étrangement d’y répondre sérieusement. Pour beaucoup, c’est un crève-cœur de voir Michael Moore assumer de produire quelque chose d’aussi peu sérieux. De nombreux activistes importants, également proches de Bernie Sanders, comme l’auteur du film Gas Land (sur les dégâts du gaz de schiste) ou encore Naomi Klein ont tenté de dissuader Michael Moore de sortir le film, tant il était bourré d’erreurs. Mais ce dernier a fait la sourde oreille, et le film tourne désormais presque exclusivement dans les réseaux d’extrême droite climatosceptique.

On peut lui pardonner s’il assume un jour son erreur, qui s’explique certainement par un manque de connaissance technique élémentaire. Quelque part, l’existence de ce film n’est peut-être pas une si mauvaise chose, car si les détracteurs des énergies renouvelables assument quelque chose d’aussi fragile, ils se fragilisent avec. Si cela peut permettre aux écologistes sérieux de faire le ménage parmi leurs dirigeants corrompus et d’être plus alertes vis-à-vis du greenwashing, c’est une bonne chose. À ce titre, le passage ou Michael Bloomberg parle du gaz comme d’une énergie propre est particulièrement risible. Pour ne pas tomber dans ce genre de panneau et savoir faire preuve de discernement au quotidien, rien n’épargne aux militants climat de se former sur des notions élémentaires de technique. C’est long, exigeant, mais c’est passionnant et nécessaire à l’autodéfense intellectuelle. Ce documentaire doit être un signal pour tous : chacun doit à terme être capable de debunker ce genre de grossièretés.

[1] Cette loi concerne la technologie informatique, selon l’énoncé de Gordon E. Moore. Très vulgarisée, elle dit que le nombre de transistors que l’on peut mettre dans un ordinateur de même volume double tous les 18 mois, doublant la puissance de calcul. Cela est rendu possible grâce à la miniaturisation, aux progrès de fabrication, à la baisse des coûts. Cette loi n’est plus valide en informatique depuis quelques années, car on touche aux limites physiques dans la miniaturisation.

Appelez les pompiers, pas le colibri

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© Creative Commons CC0

La lenteur avec laquelle les gouvernements opèrent la transition écologique – quand ils ne prennent pas le chemin inverse – encourage les citoyens à d’autres types d’actions. Certains essayent de faire pression sur le politique par divers moyens de mobilisation collective, d’autres choisissent l’action individuelle, parfois au sein d’un collectif. Pourtant, toutes ces formes d’engagement n’ont pas la même efficacité, précisément parce que la responsabilité du changement climatique n’est pas celle de l’individu.


Le terme de catastrophe écologique recouvre plusieurs phénomènes, qui sont liés les uns aux autres : réchauffement climatique, accroissement des catastrophes naturelles et montée des eaux, chute de la biodiversité et des populations, pollutions des écosystèmes et atteintes à la santé humaine, notamment.

Pour l’écologie, deux méthodes

Les méthodes des activistes écologistes sont multiples et se partagent principalement entre deux paradigmes. Certains militants veulent changer le monde en se changeant eux-mêmes. Ils deviennent végétariens, se déplacent à vélo et tentent de convaincre un maximum de personnes autour d’eux de faire de même. L’idée est qu’une fois tout le monde converti au végétarisme, l’industrie de la viande s’écroulera.

L’autre type de militants souhaite prendre le pouvoir. En effet, le pouvoir législatif permet d’écrire des lois imposant directement des limitations aux industries polluantes et nocives. Une loi peut également soutenir les industries ou méthodes alternatives, comme l’agriculture biologique ou l’agroécologie. Bien sûr, ces deux moyens de la lutte peuvent aller de pair et nombre de militants les reprennent tous les deux. Mais leur efficacité comparée est l’objet d’un juste débat. Leur priorisation trahit l’idéologie de celui ou celle qui les porte.

https://www.liberation.fr/france/2018/08/28/hulot-sur-france-inter-un-moment-de-radio_1674972
Nicolas Hulot annonce sa démission sur France Inter

Le gouvernement actuel a choisi sa méthode. Il croit aux incitations, comme le marché des droits à polluer – instauré en Europe en 2005 et connu pour son échec. L’un de ses anciens membres, Nicolas Hulot, a vertement critiqué son action en le quittant. Pour lui, d’une part, le pouvoir de changer les choses passe par la prise du pouvoir. D’autre part, le gouvernement actuel ne fera rien de suffisant dans cette lutte car il est arrimé idéologiquement au libéralisme économique qui n’est pas compatible avec la lutte écologique.

La faute n’est pas du côté des ménages

Ayant clarifié ces positions, analysons les méthodes citoyennes des prosélytes de l’écologie. Les limites de leur démarche sont de plusieurs ordres. Tout d’abord, cette écologie des petits gestes possède une dimension culpabilisante inutile, voire nocive. Julien Vidal le montre avec son initiative et son livre Ça commence par moi[1], bien qu’il présente ses exemples (faire pipi sous la douche, trier ses déchets etc.) avec l’idée que « c’en est terminé de l’écologie dépressive, culpabilisante, punitive ». L’idée est toujours celle d’une responsabilité de tous les humains. Or s’il y a partage de responsabilité, il s’agit d’un partage bien peu équitable.

En effet, si c’est bien un certain mode de vie qui cause la catastrophe écologique, il ne résulte pas d’un choix conscient des individus ni d’un choix démocratique du peuple. Par exemple, le documentaire de Cash investigation de septembre 2018[2] a montré comment l’industrie alimentaire s’y est prise pour imposer les bouteilles en plastique plutôt qu’en verre. Contrairement au verre, le plastique pollue les milieux naturels en diffusant notamment des microparticules, dont des perturbateurs endocriniens.

La Coca-Cola Company a abandonné ce modèle il y a quelques décennies, en finançant des lobbys pour infléchir la législation et des campagnes massives de publicité pour infléchir l’opinion publique[3]. L’ancien système de la bouteille en verre consignée était plus coûteux pour les distributeurs de boissons, qui devaient organiser la collecte et la réutilisation (plutôt que le recyclage) des bouteilles. Dans ce cas précis, la culpabilisation a été poussée jusqu’à la diffusion par Coca-Cola d’un spot publicitaire montrant un indien d’Amérique qui pleure face à une personne qui jette ses déchets dans la nature, accompagné du slogan « Keep America beautiful ». La Coca-Cola Company a même créé une association de ce même nom, pour diffuser l’idée de la responsabilité citoyenne dans la lutte contre la pollution[4].

De même, le cas de l’obsolescence programmée est symptomatique. Que les industriels soient amenés à saboter leurs propres produits montre que le système économique actuel est absurde et, en l’occurrence, antiécologique. Pour prendre un dernier exemple, les paquebots de croisière émettent autant de particules fines en un jour qu’un million de voitures particulières[5]. Pour réduire la pollution atmosphérique dans les ports fréquentés par ces bateaux, il serait donc bien plus efficace d’interdire les croisières plutôt que d’espérer que les habitants utilisent un peu moins leur voiture parce que le carburant serait un peu plus cher. Et dans les campagnes, les habitants n’ont a priori pas d’autre alternative que leur voiture pour se déplacer. Inutile dès lors d’augmenter les taxes sur le carburant en pensant réduire ainsi les émissions de GES et de particules fines.

À l’opposé, rétablir le service public des petites lignes de train est à la fois vertueux du point de vue écologique et social. En fin de compte, la dimension culpabilisante de l’écologie du quotidien réside dans le fait que le mode de vie des individus est fortement contraint par leur position sociale[6]. Cela a bien été perçu et mis en avant par le mouvement des gilets jaunes, fin 2018, qui s’est soulevé au départ contre une taxe sur le gazole. Dès 2015, les cars Macron représentaient l’exemple typique de ce qu’il ne faut pas faire : opposer justice sociale et lutte contre le changement climatique[7]. Il est en effet indécent de demander des efforts au prétexte écologique à ceux qui peinent à joindre les deux bouts lorsqu’à l’opposé, les plus fortunés bénéficient de mesures favorables comme la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune.

Au-delà de l’insensée culpabilisation, essayons maintenant d’imaginer « le poids réel des petits gestes du quotidien […] : au niveau mondial, 90% de l’eau douce consommée est utilisée par le secteur agricole (65%) et par l’industrie (25%). » En jouant sur la consommation des ménages, seulement 10% du problème pourrait donc être réglé. Quant aux déchets, en France, « les 38,6 millions de tonnes de déchets ménagers restent bien loin des 310 millions de tonnes produits par les entreprises en 2010 »[8]. Enfin concernant l’énergie, il est à noter que l’amélioration de l’efficacité énergétique des installations existantes (en particulier le chauffage) est allée de pair avec une apparition de nouveaux usages (appareils électroniques notamment), en résultant une hausse constante de la consommation d’énergie.

En somme, il peut être réconfortant de faire ces actions individuelles, mais éteindre la lumière n’économise qu’une quantité très faible de GES et de toute façon des entreprises laissent régulièrement des bureaux entiers allumés la nuit. Grâce aux tribunaux d’arbitrage, notamment issus des derniers traités de libre-échange comme le CETA[9], les multinationales peuvent même attaquer en justice les États qui contreviendraient à leurs possibilités de profit. Il va donc falloir engager un rapport de force contre ces multinationales et leurs responsables. On ne peut attendre des pollueurs qu’ils réduisent d’eux-mêmes leurs émissions dans un système qui ne les contraint pas à le faire. Les industriels ne font aucun effort (au sens d’engagement volontaire et désintéressé), et souvent ne respectent même pas leurs engagements[10]. Les individus peuvent le faire, mais au prix d’un stress généré par les injonctions paradoxales qu’ils reçoivent : consommer, mais de manière responsable – car c’est vous le responsable[11].

La question des institutions

La catastrophe écologique est donc liée à un système de domination sociale, elle-même enchâssée dans une oppression institutionnelle. Il faut remarquer que dans l’état actuel des institutions, la transition écologique n’est pas finançable. Les traités européens empêchent les États d’agir librement en matière économique (déficit public conjoncturel autorisé à 3%, et structurel à 0,5%, monnaie unique européenne, etc.) et également en matière industrielle (interdiction pour un État d’aider des entreprises nationales, au nom du droit à la concurrence).

Or, la transition écologique a besoin d’une politique industrielle ambitieuse pour transformer radicalement (c’est-à-dire complètement) le système de production et d’une marge budgétaire pour réorienter la consommation. D’autre part, les traités de libre-échange empêchent de refuser des marchandises produites dans des conditions polluantes ou socialement injustes, ce qui limite la coordination solidaire que l’on pourrait instaurer avec les États qui le souhaitent. Il faut donc changer ces institutions. Un surplus de démocratie, comme le référendum d’initiative citoyenne, pourrait permettre d’y parvenir.

Les colibris et la collapsologie

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Colibri © Brocken Inaglory

Parmi les figures de l’écocitoyenneté se trouve Pierre Rabhi, le paysan ardéchois superstar des journaux, et Cyril Dion, cofondateur avec lui du mouvement des colibris[12], réalisateur du long-métrage Demain et du documentaire Après-demain. Ils ont nommé ainsi leur association en hommage à une fable amérindienne que Pierre Rabhi aime à rappeler. Lors d’un feu de forêt, un colibri s’emploie à faire des allers-retours pour jeter des gouttes d’eau sur le feu. Lorsque les autres animaux lui font remarquer qu’il est trop petit pour éteindre l’incendie, il rétorque qu’il le sait, mais qu’il fait sa part. Cependant, comme l’a remarqué le journaliste Jean-Baptiste Malet dans une enquête publiée dans Le Monde diplomatique, Pierre Rabhi omet qu’à la fin de la fable amérindienne, le colibri meurt d’épuisement et la forêt est partie en fumée. Le danger n’est-il pas dans cette « écologie inoffensive»[13], qui rassure les citoyens de bonne volonté tout en s’assurant qu’ils ne dérangent personne[14] ?

Les colibris gravitent dans une nébuleuse que l’on observe de plus en plus sensible aux thèses portées par les collapsologues. Parmi eux, Pablo Servigne rappelle régulièrement combien « l’effondrement de notre civilisation thermo-industrielle » sera dur et déprimant, d’un point de vue personnel. Mais qui est-ce qui sera triste et pour qui ? C’est bien « notre civilisation thermo-industrielle » qui rend la vie dure, dès aujourd’hui et pas dans un avenir plus ou moins lointain, pour des millions d’êtres humains et d’animaux. Ce n’est pas le réchauffement qui viendra mettre à mal notre société, c’est notre société qui a réchauffé la planète, qui ravage le seul écosystème dans lequel nous pouvons pourtant vivre.

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Pablo Servigne sur © Thinkerview

Que ce système inique de pillage institutionnalisé vienne à s’effondrer pourrait tout aussi bien nous réjouir. Cette précision est systématiquement éludée par les collapsologues. Et à la question subséquente de savoir s’il faut ralentir ou accélérer l’avènement de l’effondrement, Pablo Servigne évite très soigneusement de répondre[15]. Il se limite à agréger des faits – dans la première partie de son premier ouvrage[16] – et à émettre des idées philosophiques piochées çà et là dans la seconde partie, ainsi que dans son nouveau livre[17]. Son travail d’agronome et de biologiste lui permet de circonscrire utilement le concept d’effondrement, qu’il définit avec Yves Cochet[18] comme le « processus à l’issue duquel les besoins de base ne sont plus fournis à une majorité de la population par des services encadrés par la loi ». Outil qui montre sa pertinence pour mettre en relation des évolutions passées des sociétés humaines, l’effondrement n’est pas un moyen politique permettant de lutter contre les évolutions anticipées de ces mêmes phénomènes.

En agglomérant en même temps des idées à droite et à gauche, Pablo Servigne risque d’être repris par sa droite. Comme un certain journalisme se borne à donner des faits sans essayer de les expliquer, de les relier, de les sous-tendre par des contextes historiques et doctrinaires, la collapsologie se contente de constater la pluralité des facettes de la catastrophe en cours comme la pluralité des positions existantes face à elle. Refusant de choisir parmi les idéologies mises en confrontation, ne voulant pas cliver, pour mieux rassembler, la collapsologie s’effondre sous son propre poids. En cela, Pablo Servigne et Cyril Dion adoptent d’ailleurs la même démarche, et la même faiblesse opérationnelle[19]. Voilà pourquoi leur discours tend très rapidement vers la psychologie, qui dissout les rapports de force et les structures sociales réellement existants dans les eaux glacées de la médicalisation des comportements.

Les limites du collectif citoyen

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Cyril Dion © Bright Bright Bright

Dans une tentative légitime de faire un pont entre individualisme et collectif, Cyril Dion suppose que le système tient sur des récits[20] qu’il faudrait changer par une conscientisation progressive des masses. Si les idéologies, qui portent de fait des récits, ont évidemment leur rôle dans la catastrophe en cours, il ne faut pas le surestimer par rapport à celui joué par les institutions. Ces dernières ont une influence sur les corps, ce qui permet au système de tenir concrètement – la dernière à ce titre étant en définitive la police. Peut-être Cyril Dion omet-il ce fait car il n’y est pas lui-même exposé, comme il le reconnaît d’ailleurs – dans une conférence récente, il s’adressait à « ceux qui ont une marge de manœuvre financière »[21]. Cela permet également de trancher l’interrogation précédente : s’adressant à un public ayant un certain confort dans la société actuelle, il est admis implicitement que la difficulté dans l’effondrement sera donc de devoir abandonner ce confort de vie. Et pour ces personnes en effet, il peut être réconfortant de faire les petits gestes, ceux-ci pouvant combler une juste aspiration à l’action. Ainsi cette écologie « s’efforce de promouvoir des formes d’engagement domestiquées, susceptibles de satisfaire le désir d’agir qui se fait jour tout en le réorientant dans une direction non antagonique, compatible avec les intérêts [des industriels] plutôt qu’en conflit avec eux » [22].

La démarche des collapsologues et de l’écologie dite citoyenne se ramène donc à l’intériorité, fût-elle connectée – aux autres, à la terre, au vivant, voire à soi-même etc. Ainsi, elle s’inscrit finalement dans l’atomisation sociale et l’apolitisation créée par le néolibéralisme depuis plus de trois décennies[23].

Plutôt que de se couper des réseaux, appuyons-nous dessus. Le mouvement des gilets jaunes le montre aujourd’hui : la reconstruction d’un collectif local, d’une fraternité incarnée sur les ronds-points, est allée de pair avec une politisation générale et accélérée, et avec une liste de revendications qui cherchent à reconstruire la solidarité nationale, notamment par la défense des services publics. In fine, les réponses appropriées aux questions posées par la collapsologie sont impossibles à atteindre à partir de leurs postulats.

Le cas emblématique est celui d’Aurélien Barrau, astrophysicien qui s’échine à dire que tout gouvernement qui ne mettrait pas la sauvegarde de l’environnement au centre de sa politique ne serait pas crédible, tout en évitant de préciser que le gouvernement actuel ne le fait pas. Ainsi peut perdurer l’illusion macroniste du hashtag Make our planet great again.

Au-delà de la distance entre paroles et actes, les idées, aussi bien exprimées, et les faits, aussi bien relatés, ne suffisent pas. Spinoza, parfois mal interprété, signifiait cela en disant qu’une idée vraie n’a pas de force en tant qu’elle est vraie[24]. Elle en a une en tant qu’elle est utilisée dans un rapport de force, empuissantée[25]. Ainsi l’idéologie dominante, qui n’est autre que celle de la classe dominante, l’est grâce aux pouvoirs que les dominants ont pour la naturaliser, notamment via la possession de journaux. Pour modifier l’opinion publique, le bouche-à-oreille citoyen risque de ne pas suffire. À ne vouloir s’aliéner personne, on risque de ne pas modifier les rapports de force existant, c’est-à-dire l’ordre établi, c’est-à-dire encore ce qui cause la catastrophe écologique.

Reprenons pour terminer le dernier ouvrage de Pablo Servigne et de ses collègues : la fin de la préface y indique « arrêtons de dévaler la pente de cette modernité délétère. Opposons-lui notre intériorité ». Certes, mais une intériorité n’a jamais pu grand-chose face à une tractopelle, un loyer trop cher ou un flash-ball. Quelques lignes plus loin, il nous est proposé « d’élever nos spiritualités », avant que ne commence le premier chapitre, « Apprendre à vivre avec ». Ne faudrait-il pas plutôt élever notre indignation face à ce système, et loin de vivre avec, lutter contre ?


[1] « Julien Vidal nous parle de son combat quotidien pour la planète », Konbini News, Youtube, 4 septembre 2018 ; Ça commence par moi, Julien Vidal, éditions du seuil, septembre 2018. Il se réfère abondamment à Pierre Rabhi et au mouvement des colibris, à Cyril Dion, et à Pablo Servigne.

[2] « Cash investigation. Plastique, la grande intox », présenté par Elise Lucet, France Télévisions, 11 septembre 2018

[3] Ces techniques ont été étudiées par Edward Herman et Noam Chomsky dans La Fabrication du consentement : De la propagande médiatique en démocratie (1988). Un documentaire a été réalisé par Arte France et l’INA autour de ce thème en 2017, Propaganda la fabrique du consentement.

[4] « Eh bien, recyclez maintenant ! », Grégoire Chamayou, Le Monde Diplomatique, février 2019

[5] « Un paquebot de croisière émet autant de particules fines qu’un million de voitures », Actu Nautique, novembre 2018

[6] Autre exemple : environ 40% des Français ne prennent jamais l’avion, d’après Statista, ce qui est pourtant cité comme l’un des gestes les plus pollueurs. Voir également « Enquête : les nouveaux comportements des Français pour prendre l’avion », Air Journal, 2014. « Cette étude a été menée auprès de 1011 Français représentatifs de la population française de 15 ans et plus. La méthode des quotas croisés a été appliquée : CSP + âge + région + habitat + sexe. »

[7] « La justice sociale, clé de la transition écologique », Philippe Descamps, Le Monde Diplomatique, janvier 2019. « Chaque américain, luxembourgeois ou Saoudien appartenant aux 1% les plus riches de son pays émet 200 tonnes [de GES] par an, soit plus de 2000 fois plus qu’un pauvre du Honduras ou du Rwanda »

[8] « Ce ne sont pas les petits gestes du quotidien qui sauveront la planète », Frustration n°15 Les riches nous tuent, septembre 2018

[9] Canada Europe Trade Agreement, accord de libre-échange Canada-Europe. Il est appliqué « provisoirement » depuis le 21 septembre 2017, en attendant sa ratification par les parlements nationaux des Etats-membres de l’Union Européenne.

[10] « Total est le premier émetteur de GES de France et le 19ème au monde. Il a déclaré un bénéfice net de 8,6 milliards de dollars en 2017. Pourtant, il continue d’être en infraction avec les dispositions issues de la COP21 » (Gilles Gauché-Cazalis, élu municipal du groupe majoritaire (PCF) à Nanterre, Nanterre info, décembre 2018)

[11] Grégoire Chamayou, op. cit.

[12] Voir ici leur page Wikipédia.

[13] « Le système Pierre Rabhi », Jean-Baptiste Malet, Le Monde diplomatique, août 2018 ; « L’autre Interview : Jean Baptiste Malet », Le Média, Youtube, 19 septembre 2018

Voir également « L’anthroposophie, discrète multinationale de l’ésotérisme », Jean-Baptiste Malet, Le monde Diplomatique, juillet 2018. On y découvre les liens entre le mouvement des colibris et l’antroposophie, via notamment la personne de Françoise Nyssen, adepte des deux écoles, ministre de la culture sous le premier gouvernement Philippe, avant d’être démise pour une affaire l’impliquant dans sa maison d’éditions Acte Sud, par laquelle elle a publié les livres de Cyril Dion.

[14] On peut mener le même raisonnement en le limitant à la question des inégalités sociales : faut-il redistribuer les revenus tout en laissant tourner l’implacable compétition de marché, ou bien s’attaquer précisément aux mécanismes qui permettent cette répartition injuste de la richesse ? Cf « Déplorer les inégalités, ignorer leurs causes », Daniel Zamora, Le Monde Diplomatique, janvier 2019.

[15] Pablo Servigne, Entretien pour la chaîne Youtube Thinkerview, 2018. Écouter à partir de 1h06min pour la question de savoir s’il vaut mieux ralentir ou accélérer l’effondrement. Il a posé cette question sur Facebook à propos des solutions vues dans Demain. Récoltant des réponses partagées, il ne prend pas position lui-même.

[16] Comment tout peut s’effondrer, Pablo Servigne et Raphaël Stevens, éditions du seuil, 2015

[17] Une autre fin du monde est possible, Pablo Servigne, Raphaël Stevens, Gauthier Chapelle, éditions du seuil, 2018

[18] Yves Cochet rapporté par Pablo Servigne, Entretien pour la chaîne Youtube Thinkerview, 2018. Question posée de la définition de l’effondrement à partir de 25min.

[19] « La ZAD et le Colibri : deux écologies irréconciliables ? », Maxime Chédin, Terrestres.org, novembre 2018

[20] Cyril Dion, comme Pablo Servigne, citent directement la thèse de Yuval Noah Harari, par ailleurs très critiquable. Lire « Tout est fiction, reste le marché », Evelyne Pieiller, Le Monde Diplomatique, janvier 2019

[21] « Carte blanche à Cyril Dion », 24 janvier 2019, au Ground Control à Paris

[22] Grégoire Chamayou, op. cit.

[23] « Que faire ? – 2/4 », groupe Jean-Pierre Vernant, 2 janvier 2018.

[24] « La connaissance vraie du bon et du mauvais ne peut, en tant que vraie, contrarier aucun affect ; elle ne le peut qu’en tant qu’elle est considérée comme un affect ». L’Ethique, IV (de la servitude humaine), proposition XIV

[25] Les affects de la politique, Frédéric Lordon, éditions du seuil, 2016