Le droit de vote à 16 ans : un débat à venir

Le droit de vote à 16 ans : rencontre avec Giuseppe Aviges, vice-président de l’UNL. L’Union Nationale Lycéenne est la première organisation à avoir milité en faveur du droit de vote à 16 ans. Retour avec le vice-président du syndicat lycéen sur le sens de cette revendication.

LVSL – Depuis quand l’UNL défend-elle le droit de vote à 16 ans ? Quel constat vous a amené à envisager ce combat ?

Giuseppe Aviges – L’UNL est favorable à l’élargissement du droit de vote à 16 ans depuis plus d’une dizaine d’années, et cette revendication est l’aboutissement d’une réflexion de fond sur l’implication de la jeunesse dans la société et sur la prise en compte de celle-ci dans les débats publics. Nous avons aussi constaté, lors de la mobilisation du CPE, la volonté des jeunes de se faire entendre. À l’approche de l’élection présidentielle de 2017, nous sommes par ailleurs ravis de voir que cette idée a fait son bout de chemin : le candidat de la France insoumise en a fait un point majeur de son programme présidentiel, la primaire écologiste était ouverte aux 16-18 ans, Thierry Solère, porte-parole de François Fillon, s’est personnellement positionné pour…

À l’heure d’une forte abstention, d’un désintérêt pour les partis et le vote même en général, en quoi les jeunes seraient-ils plus impliqués ?

Loin d’imaginer que le fait électoral serait l’unique facteur d’implication, notre volonté de voir le droit de vote accordé aux 16/17 ans s’inscrit dans une démarche globale : remettre le citoyen, et plus globalement le jeune au cœur du processus politique, au sens large du terme. En se sentant écoutés, de par leur vote, les jeunes seraient naturellement plus impliqués.

Vos détracteurs sont nombreux : comment comprenez-vous et répondez-vous à ces réticences ?

Nos détracteurs ont souvent trois arguments qu’ils pensent de poids : les jeunes seraient trop immatures, influencés et pas conscientisés. Nous leur répondons simplement que, logiques dans la société dans laquelle nous vivons, ces arguments sont pourtant erronés. Loin des préjugés qui sont véhiculés, nous invitons ces personnes à venir observer d’elles-mêmes la maturité des lycéens. Puis à 16, 20 ou 80 ans, un individu est pareillement influencé par le monde qui l’entoure. Enfin, quant au manque de conscientisation, c’est un élément que nous partageons mais qui n’est pas à déplorer que chez les jeunes, et pour y pallier nous réclamons également une amélioration des cours d’Éducation Morale et Civique, EMC, mis en place avec la réforme des collèges, mais qui n’apportent finalement rien par rapport à l’ancien format.

LVSL – Éprouver le besoin de voter quand on est engagé au préalable semble logique, pensez-vous pour autant que cela soit une préoccupation des lycéens ?

GA – Le politique, encore une fois au sens large du terme, est très présent au lycée. Nous avons notamment pu l’observer après les attentats de 2015. Par ailleurs, nous assistons à des débats passionnés, lorsqu’ils sont proposés. Nous pensons que les lycéennes et les lycéens ont une voix à porter, celle d’une jeunesse trop souvent maltraitée, et jamais écoutée.

Comment militez-vous sur cette question concrètement ? (notamment auprès des lycéens et des hommes politiques ou élus)

Nous avions déjà tenté de faire émerger cette idée lors de l’élection présidentielle de 2012. Nous avons décidé de la remettre au cœur du débat public à l’approche de celle de 2017. Pour ce faire, nous avons organisé, entre le 6 et le 17 décembre, une grande consultation, un référendum d’initiative lycéenne, pour poser directement la question aux premiers concernés. Les résultats seront publiés début janvier. Et suite à cette-dite votation, nous interpellerons directement les candidats sur le sujet.

“À 16 ans, un jeune peut avoir une activité salariée, donc payer des impôts, est judiciairement pleinement responsable, donc peut aller en prison, est responsable de ses enfants s’il en a, etc. Pourquoi ne pourrait-il pas voter ?”

L’UNL compte-t-elle faire de ce sujet un enjeu majeur des présidentielles ?

La jeunesse en général doit être enjeu majeur de l’élection présidentielle. Il faut repenser la politique au temps long. Mais effectivement, comme je l’ai précisé à l’instant, nous avons vocation à éveiller ce sujet dans les consciences lycéennes, citoyennes, mais aussi dans celles des candidats, à travers notre congrès d’interpellation présidentielle, qui se déroulera les 25 & 26 février.

En quelques mots pourrais-tu convaincre un lecteur de la nécessité du vote à 16 ans ?

À 16 ans, un jeune peut avoir une activité salariée, donc payer des impôts, est judiciairement pleinement responsable, donc peut aller en prison, est responsable de ses enfants s’il en a, etc. Pourquoi ne pourrait-il pas voter ? C’est hypocrite.  De plus, cela permettrait à cette tranche d’âge à la fois d’avoir un autre moyen que la rue pour s’exprimer ; et puis d’être prise en compte véritablement dans les processus électoraux.