« Valeur travail ». Cette notion est partout. Les jeunes sont-ils devenus fainéants ? Faut-il plutôt arrêter de travailler pour sauver la planète ? Ce débat, essentiellement moral, laisse de côté l’héritage de l’économie classique. C’est en effet sur la « valeur travail » qu’Adam Smith et surtout Karl Marx ont fondé leur théorie. Loin de constituer un instrument de stigmatisation à l’égard des chômeurs, elle permettait de penser l’économie en termes de classes sociales – et d’antagonismes entre ces classes. Une telle prise de recul permet de mieux penser les enjeux relatifs au travail contemporain, et les transformations qu’il nécessite.
La séquence sociale contre la réforme des retraites a remis la question du travail dans l’actualité. Deux ouvrages récents montrent qu’il recouvre plusieurs réalités qui peuvent, ou non, se combiner. Ils établissent l’inanité de la posture moralisatrice qui domine aujourd’hui.
Quand la morale voile la dimension politique
Dans le débat public, le travail tient une place singulièrement rabougrie. Comment interpréter les récentes adjurations morales de Gérald Darmanin à propos de ceux qui « n’aiment pas le travail » ? Elles ne sont pas nouvelles : il prend la suite de son mentor Nicolas Sarkozy. Elles sont cohérentes avec le discours et la politique du gouvernement Macron.
Ces petites phrases participent d’une moralisation du débat public qui est triplement préjudiciable, comme le défend la chercheuse en philosophie Céline Marty[1]. D’abord, parce que le ton moralisateur élude la dimension politique de la question.
Ensuite, parce que cette morale productiviste « est muette sur les limites du travail ». Elle ne dit jamais « à quel moment on a bien travaillé et on peut passer à autre chose ». Elle ne permet pas non plus d’interroger le contenu du travail. Il faut travailler tout court, peu importe à quoi. Travailler dur est toujours présenté comme positif, quelles qu’en soient les conséquences physiques ou psychiques (usure du corps, maladies professionnelles, burn-out…). L’expression inverse de travailler « pas trop dur », ce n’est pas un hasard, n’existe même pas dans l’usage.
Au niveau politique, cette morale centre le débat autour de la question du niveau de l’emploi. Cela ne permet pas de débattre collectivement de la qualité et de la nature de ces emplois. Tout ce que l’on autorise, dans la discussion, a généralement trait à l’ouverture ou à la fermeture d’un entrepôt sur un « territoire ». Le travail y est souvent dur et on ne connaît rien de la nature des biens vendus, mais il faudrait se positionner pour ou contre la « création d’emplois ». La catastrophe écologique en cours démontre pourtant le besoin urgent de poser des limites à l’activité humaine, qu’une défense inconditionnelle de la valeur travail empêche de penser.
La « valeur travail » : avant Gérald Darmanin, Karl Marx
La mobilisation de cette expression par Nicolas Sarkozy ou Emmanuel Macron ferait oublier qu’il s’agit d’un concept analytique issu de l’économie classique, utilisé par Smith, Ricardo et Marx. Pour le comprendre, un peu de théorie est nécessaire. En économie, les marchandises sont produites par l’association des deux facteurs de production que sont le capital et le travail. Elles sont ensuite échangées. Mais d’où vient leur valeur relative d’échange ? Toutes les écoles de pensée économique ont planché sur ce problème. Marx et les classiques affirment que la valeur des marchandises est proportionnelle à la quantité de travail qui socialement nécessaire pour les produire. Marx affirme donc que la création de valeur ne provient que du travail humain et que le capital n’y contribue pas. Il est celui des classiques qui a consacré les développements les plus denses à sa théorie de valeur travail, car il cherchait à construire sur ses fondements une théorie de l’évolution historique des sociétés.
Sur le plan purement analytique, ce choix pose des problèmes difficiles. Il a reçu plusieurs critiques. Les économistes keynésiens notamment, Joan Robinson la première[2], sont arrivés à la conclusion que cette théorie était contradictoire avec d’autres hypothèses analytiques de Marx. En revanche, sur le plan politique, Robinson remarque elle-même que la théorie de Marx lui permet de penser le système économique comme étant traversé par un antagonisme fondamental entre capital et travail.
En posant que tout valeur provient du travail, Marx offre un argument puissant en faveur de la socialisation des moyens de production sous la tutelle des travailleurs. En effet, si toute valeur est issue des travailleurs, à quoi servent les détenteurs des capitaux (aujourd’hui les actionnaires) ? Ainsi, dans son acception marxiste, la valeur travail signifie défendre le travail… face au capital.
On comprend ainsi pourquoi le discours d’un Darmanin sur la « valeur travail » est paradoxalement encore porteur aujourd’hui. Il fait appel à une fierté ouvrière du travail bien fait, rappelle Céline Marty. Lors de la naissance du mouvement ouvrier, les travailleurs se définissaient par le fait que leur subsistance ne dépendait pas de la propriété d’un capital, mais de leur travail. Ce fait nouveau s’imposait à eux. Mais il leur a aussi permis de s’affirmer face aux « oisifs » d’Ancien Régime, leurs anciens oppresseurs. Ainsi, cet « honneur des travailleurs » reste présent dans l’imaginaire populaire aujourd’hui, jusqu’à la chanson des gilets jaunes.
En quoi consiste alors cet usage usurpé de la valeur travail ? Emmanuel Macron utilise l’expression pour faire passer ses réformes successives du marché de l’emploi et de l’assurance chômage. En limitant les conditions d’accès et en baissant le niveau des allocations, ces réformes ont pour effet d’inciter les travailleurs privés d’emploi à en reprendre un le plus vite possible, qu’il soit adapté ou non à leur situation. Romaric Godin, journaliste économique de Médiapart, avait lui aussi fait une analyse précise de cette stratégie d’Emmanuel Macron. Sa conclusion est limpide : « dans la vision macroniste de l’économie, le capital est plus important que le travail et le travail doit suivre le capital. ». Pour lui, ce renversement du sens originel de la valeur travail est logique dans la mesure où « la seule vraie conséquence de la valeur travail est, en réalité, le socialisme. »
Politiquement il peut donc exister à gauche un besoin de recadrage du discours sur le travail. Notre rédaction l’avait perçu après la séquence électorale de l’an passé, en faisant débattre Sophie Binet, à l’époque secrétaire générale de l’UGICT-CGT, et le député insoumis François Ruffin. Ce dernier met en avant le sujet politique du travail afin d’emporter l’adhésion des classes populaires, y compris rurales. À l’encontre d’un Fabien Roussel, il ne considère pas qu’il faille parler n’importe comment de n’importe quel travail. Il s’agit plutôt « d’héroïser » les travailleurs indispensables au bon fonctionnement de la société, ceux-là même qui avaient été désignés comme essentiels lors de la crise du COVID. C’était sa démarche pour les auxiliaires de vie sociale dans son film Debout les femmes, co-réalisé avec Gilles Perret.
Activité pénible, utilité sociale, emploi… de quoi le travail est-il le nom aujourd’hui ?
Ces rappels historiques étant posés, de quoi parle-t-on lorsqu’on évoque le travail aujourd’hui ? Ce mot a une longue histoire, que retrace Marie-Anne Dujarier dans Troubles dans le travail. Sociologie d’une catégorie de pensée[3]. Dans la première partie, la sociologue décrit comment le mot est arrivé à ses trois sens actuels : « l’activité, la peine que l’on se donne pour faire quelque chose ; le résultat de cette activité, l’ouvrage ; enfin l’emploi. Le « travail » sert à désigner aujourd’hui l’une de ces trois dimensions, ou leur combinaison.» (p. 365).
Que disent les travailleurs lorsqu’ils évoquent l’absence de sens au travail ? Thomas Coutrot et Coralie Perez se sont penchés sur cette question en épluchant les enquêtes de conditions de travail de la DARES[4]. Pour les auteurs, le sens au travail repose sur trois piliers. Ils les définissent comme l’utilité sociale, la cohérence éthique et l’accomplissement de soi. La cohérence éthique ou « travail empêché » est la possibilité de bien faire son travail. L’accomplissement de soi relève de l’expérience que l’on peut acquérir (« je sors grandi de l’épreuve »).
Si les deux livres étudient le travail selon trois dimensions, ils ne les définissent donc pas de la même façon. Coutrot et Perez se restreignent à l’emploi et en particulier aux questions présentes dans les enquêtes de la DARES. Marie-Anne Dujarier mène un travail plus complet en étudiant aussi les autres significations du travail.
La polysémie du travail est précisément ce qui rend possible ce que l’autrice nomme un « jeu de bonneteau avec ses trois principales significations : dans un mouvement créant de la confusion, au nom de l’une d’entre elles et des valeurs qui lui sont accolées, les deux autres sont embarquées et déplacées. Dans ces usages stratégiques, la polysémie n’est alors pas un problème, mais une arme » (p. 349). Arme que les gouvernements conservateurs ont l’habitude d’utiliser, comme on l’a vu précédemment.
Frontières troubles du travail
Ces diverses définitions du travail peuvent se combiner comme exister séparément. Marie-Anne Dujarier défend que ces situations de travail incomplet engendrent de la souffrance chez les travailleurs. Ainsi « s’accumulent des situations dans lesquelles l’activité, l’utilité sociale et économique, l’emploi et le revenu sont désarticulés, ouvrant sur des conflits sociaux et psychiques au moment de savoir qui travaille et quand. » (p. 367).
Elle évoque tout d’abord les « emplois nocifs et inutiles ». Il s’agit des bullshit jobs repérés par David Graeber, anthropologue américain décédé du Covid en 2020. Leur existence repose implicitement (ou explicitement) sur l’idée que n’importe quel emploi est préférable à l’absence d’emploi, et qu’il faut « plutôt faire n’importe quoi que de rien faire ».
Inversement, « nombre de pratiques classées comme n’étant pas du travail, elles, sont vitales » (p. 367). Ce sont des activités non rémunérées, bien que pénibles et utiles voire indispensables. Il s’agit bien évidemment du travail domestique, mis en avant notamment par les féministes matérialistes des années 1970. Mais les pratiques de care s’étendent aujourd’hui au-delà du foyer. Elles peuvent être sociales (par exemple personnes aidantes pour des proches dépendants) comme écologiques. Le bénévolat sous diverses formes (associative, dans les partis politiques, pour les JO, etc.) en fait aussi partie. Il concerne aussi une catégorie souvent oubliée, les « femmes de » : femmes de commerçant qui aident au magasin, et qui ne sont pourtant pas juridiquement employées, femmes de chercheur, d’écrivain, etc.
Enfin il faut ajouter que la rémunération d’un emploi n’est presque jamais corrélée à la peine donnée au travail, ni à son utilité sociale. C’est même la corrélation inverse qui prévaut. Cela a été démontré très clairement par un rapport cité par François Ruffin et analysé dans nos colonnes.
Concluons avec l’exemple de ce qui est appelé en recherche le « hope labor » (p. 295). Ce type de travail recouvre les stages non rémunérés et autres formes de production bénévoles destinées à décrocher un emploi. Là encore, le débat sur la légitimité de ces formes lacunaire de travail est refermé par des postures morales condescendantes.
Aucun indicateur ne rend compte à lui tout seul de la question du sens au travail
Thomas Coutrot et Coralie Perez ouvrent également leur livre en citant le concept des Bullshit jobs de David Graeber. Pourtant, leur définition du sens au travail s’éloigne de la sienne. David Graeber n’avait lui qu’une seule question à poser aux travailleurs : votre travail apporte-t-il quelque chose au monde ?[5] Et il n’avait pas pour objet une évaluation économétrique précise de la prévalence du phénomène. Il s’agit peut-être d’une des raisons du succès du livre de l’auteur américain. Sa définition des bullshit jobs a immédiatement parlé à des millions de travailleurs, bien qu’ils fussent dans des situations concrètes différentes.
Une limite de la démarche de Coutrot et Perez est d’amalgamer les trois facteurs du sens au travail (étudiés via les réponses à neuf questions en tout) dans une seule moyenne. Cette moyennisation de neuf questions en trois, puis en un chiffre, les conduit à des énoncés lénifiants voire déroutants. Ainsi, leur résultat le plus général consiste à donner la liste des 15 métiers à plus faible, et respectivement à plus fort, sens du travail. Or ces deux listes regroupent des situations très différentes. Et des métiers semblant proches sont à la fois parmi ceux ayant le plus ou le moins de sens.
Autre exemple, la présence d’élus du personnel a un impact négatif sur le sens au travail. Elle produit une baisse de 73 à 67% des réponses sur l’utilité sociale, et une baisse de 72 à 62% de celles sur la capacité à bien faire son travail. Comme le notent les auteurs, « tout se passe comme si l’existence d’une représentation collective favorisait une prise de conscience critique concernant le sens du travail » (p. 29). C’est un résultat finalement plutôt évident, mais énoncé de manière curieuse lorsqu’on parle uniquement du sens (unique) du travail : le syndicalisme diminue le sens au travail.
Le livre des deux économistes contient néanmoins des éléments pertinents à verser au débat. Il montre que la question du sens au travail touche aussi bien les ouvriers que les cadres. En effet, la DARES étudie les conditions de travail de tous les salariés. La dégradation du sens au travail engendre des affections psychiques (dépression, épuisement professionnel) chez tous (p. 42). De même, les conséquences environnementales du travail sont scrutées à la fois par des jeunes diplômés qualifiés que par des ouvriers, notamment dans les industries polluantes.
Ce résultat est assez peu étonnant car au sein du rapport de production, les cadres sont des travailleurs au même titre que les ouvriers. Comme eux et à l’opposé des capitalistes, ils ne décident pas de ce qui est produit, ni de comment cela est produit. Il est donc sensé de constater qu’ils sont soumis aux mêmes questionnements sur le sens de leur travail que les ouvriers. À l’inverse, on n’a jamais entendu un commerçant ou un entrepreneur se plaindre du sens de son travail.
Coutrot, Perez et Dujarier montrent finalement que les politiques publiques du travail des dernières décennies sont les responsables de la dégradation de son sens au sens large. Il s’agit des changements permanents dans les organisations de travail, de la multiplication de la sous-traitance, et des objectifs chiffrés fondés sur des indicateurs de performance. Ces méthodes délétères d’abord appliquées à l’industrie le sont maintenant dans les services aux entreprises et même dans les services à la personne.
Les réponses patronales à la crise du sens au travail n’y changent rien
Ces problèmes ne sont donc pas nouveaux. Ils ont perduré aussi à cause de la capacité du capitalisme à absorber les critiques qui lui sont faites. Ce fut le cas lors la crise du modèle fordiste dans les années 1980. Les capitalistes ont alors promis aux travailleurs de leur rendre une part de l’autonomie décisionnelle que le taylorisme leur avait enlevée. En effet, le « toyotisme » ou lean management était censé permettre aux employés de corriger les procédures de travail lorsque celles-ci ne correspondaient pas à leur activité réelle (le travail réel n’étant jamais réductible au travail prescrit, selon les mots de Christophe Dejours).
Ces manœuvres patronales ont été analysées de manière critique à de nombreuses reprises, notamment par Frédéric Lordon et Danièle Linhart. Pour eux, « la mise en avant d’un pseudo-sens du travail ne serait qu’un subterfuge pour légitimer l’intériorisation des finalités patronales et masquer l’exploitation » (Coutrot et Perez, ibid. p. 43). En effet, pour reprendre les mots de Frédéric Lordon, ce sont les capitalistes qui donnent à la production le sens qu’ils désirent. Ils s’efforcent ensuite d’aligner le désir des travailleurs dans la même direction. Le type d’initiatives managériales visant à redonner la parole aux travailleurs tient donc le plus souvent du simulacre, car les détenteurs de capitaux demeurent, en dernière instance, les décisionnaires.
Pour Thomas Coutrot et Coralie Perez, c’est précisément ce qui rend ces initiatives intéressantes. Ainsi, « les managers sont contraints de reconnaître que le travail ne peut être réduit à une série de consignes et de gestes prédéfinis, […] parce qu’au cœur de l’activité de travail se loge un pouvoir d’agir qui, en dépit des tentatives répétées du management, n’est pas entièrement éliminable » (p. 44).
Enfin, Coutrot et Perez passent au crible des chiffres d’autres propositions patronales contemporaines. De nombreuses entreprises mettent en place des projets dits de « responsabilité sociale et environnementale ». Les enquêtes établissent que la présence ou non de ce type d’initiative dans une organisation donnée n’a d’impact sur aucune des trois dimensions du sens au travail. C’est par exemple le cas des entreprises dites à mission. La « codétermination » améliore quant à elle les capacités de développement des travailleurs, mais n’influe pas sur le contenu même de la production de l’entreprise. Enfin, les entreprises « libérées » le sont par leur chef, dans des conditions déterminées par lui et sachant qu’il peut les réenfermer à tout moment…
L’organisation du travail doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes
Les auteurs arrivent au terme de leur démonstration à la conclusion énoncée par Alain Supiot dans ses ouvrages que « le mouvement ouvrier a évacué le contenu et le sens du travail de la notion de justice sociale (p. 140), et qu’il doit maintenant les y remettre. Les travaux des universitaires, articulés par les politiques et les syndicats, le démontrent. Les Françaises et les Français, qu’ils soient qualifiés ou non, attendent un grand plan de transformation écologique et sociale du travail. Le travail ne va pas disparaître, mais il doit considérablement changer.
Ce plan doit passer par l’arrêt des activités inutiles ou nocives et par la bifurcation de millions de personnes vers des activités de préservation sociale et écologique. Tout en réduisant le temps de travail et en redressant la distribution des richesses, il doit aussi permettre à chacun de participer à la décision de ce que l’on produit, et de comment on le produit. Après tout, à qui d’autre faire confiance pour le faire ? Comme le déclarait Sophie Binet, « nous sommes tous et toutes les micro-experts de notre travail ».
Notes :
[1] Les citations de ce paragraphe sont issues de l’entretien de Céline Marty avec Paloma Moritz sur le média audiovisuel indépendant Blast, Youtube, 13 mars 2023.
[2] Joan Robinson, Essai sur l’économie de Marx, 1942. Nouvelle édition française : 2022, Les éditions sociales.
[3] Marie-Anne Dujarier, Troubles dans le travail. Généalogie d’une catégorie de pensée, PUF, septembre 2021
[4] Thomas Coutrot, Coralie Perez, Redonner du sens au travail, Seuil, septembre 2022. La DARES est la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques. C’est une autorité ministérielle indépendante qui produit des statistiques à l’usage du ministère du travail.
[5] « Do you think that your job is or is not making a meaningful contribution to the world? ». Pour une discussion sur l’évaluation statistique internationale possible de cette question, voir Soffia, M., Wood, A. J., & Burchell, B. (2022). Alienation Is Not ‘Bullshit’: An Empirical Critique of Graeber’s Theory of BS Jobs. Work, Employment and Society, 36(5), 816–840.