Quelles séries policières à l’ère du mouvement Black Lives Matter ?

© Aitana Pérez pour Le Vent Se Lève

Les manifestants du mouvement Black Lives Matter ont appelé à remettre tout ce qu’il y a en rapport avec la police en question. Les séries policières sont aussi accusées d’être complices de ces violences en diffusant de la propagande pro-police sous couvert de divertissement.  

Le 26 mai 2020, une vidéo montrant George Floyd, un Afro-Américain de 46 ans, mourir sous le genou de Derek Chauvin, un policier de Minneapolis, devient virale et choque le monde. Ces images ont entraîné des protestations contre les violences policières, comme le meurtre de Michael Brown par des agents de la police de Ferguson en avait entraînées en 2014, ou d’autres encore avant lui.

Mais les manifestations de l’été 2020 diffèrent des précédentes. Déjà par leur taille, au plus gros des manifestations le New York Times a estimé qu’entre 15 et 26 millions d’Américains sont descendus dans la rue. C’est le plus gros mouvement de protestations que le pays ait jamais connu à la fois par le nombre et par ses revendications. Les manifestants du mouvement Black Lives Matter ne voulaient pas seulement que justice soit rendue pour George Floyd. Pour eux, tout le système doit être remis en question. La formation des policiers, les armes misent à leur disposition ou leur existence même. Et les séries policières ?

Des voix se sont en effet élevées contre la copaganda, mot porte-manteau composé de « cops » (flics en anglais) et propagande, utilisé pour dénoncer toutes les pratiques utilisées par les médias pour faire apparaître les policiers sous le meilleur angle possible. Un exemple connu aux États-Unis est celui de Devonte Hart, un Afro-Américain de douze ans, faisant un câlin à un officier de la police de Ferguson en 2014, en pleine manifestation contre les violences policières après le meurtre de Michael Brown par un policier. Les critiques relèvent le caractère dangereux de la copaganda. Au mieux, elle ignore l’aspect raciste des violences policières aux États-Unis et réduit le problème à quelques mauvais éléments. Au pire, elle fait partie intégrale du système, en présentant la police comme une institution fondamentalement bonne. Les policiers sont alors des personnes ne pouvant pas commettre d’actes abjects, et s’il y a des violences policières, elles sont justifiées et nécessaires.

Les séries policières dénoncées en tant qu’instrument historique de propagande en faveur de l’institution policière

Pourrait-il avoir un meilleur outil de copagande que les séries policières ? Une propagande cachée dans nos divertissements, là où notre garde est la plus basse. Où, même quand les policiers font des erreurs, parfois violentes voire fatales, chaque épisode se termine avec la certitude qu’ils sont là pour nous protéger et que la ville est plus sûre quand ils la patrouillent. 

Les manifestants anti-violences policières ne jugent-ils néanmoins pas ces séries un peu trop vite ? Après tout, la propagande est une démarche délibérée et organisée. Peut-on vraiment dire que les services de police décident de la manière dont ils seront représentés dans ces séries télé ?

Pour Jason Mittell, professeur d’Études culturelles américaines à l’université de Middlebury du Vermont, « le mot propagande est probablement une légère exagération » mais il y a néanmoins une façon « très intentionnelle » dans la manière dont les policiers à la télé sont décrits depuis que le genre existe.

La première série policière est Dragnet, produite par Jack Webb de 1951 à 1959 et adaptée de la série radio du même nom. Pour montrer la réalité des policiers du Los Angeles Police Department (LAPD), Webb conclut un accord avec ce dernier. En échange d’un droit de regard total sur le script, le LAPD fournissait une aide logistique, matérielle et même à l’écriture, puisque tous les épisodes se basent sur des faits réels. Ce réalisme était mis en avant au début de chaque épisode, avec une voix-off rappelant que « L’histoire que vous allez voir est vraie. Les noms ont été changés pour protéger les innocents. »

Dans Dragnet, le sergent Joe Friday, (Jack Webb) toujours en costume cravate, clame durant presque chaque interrogatoire ne « vouloir que les faits ». Friday garde toujours la tête froide, ne sortant que très rarement son arme et ne l’utilise qu’en dernier recours. Incorruptible, il traite les cas d’arnaques avec la même gravité que les meurtres et arrête toujours les bonnes personnes du premier coup. Chaque épisode se termine avec des gros plans sur la tête du ou des coupables du jour, avec les peines qu’ils ont reçues et la prison où ils sont détenus. 

La série a été un immense succès et a eu droit à huit saisons, un film et quatre remakes entre 1969 et 2003. Elle a aussi beaucoup aidé à redorer le blason du LAPD, qui était jusque-là plus connu pour sa corruption rampante et ses chefs ouvertement racistes et copains avec des mafieux que pour son professionnalisme et son intégrité.

Dragnet lance ainsi le genre de la série policière, populaire et très codifié, donc facilement reproductible. Beaucoup de chaînes commencent alors à s’intéresser au genre, sollicitant même l’aide des commissariats pour la production. Une demande facilement acceptée, puisque beaucoup de départements de police et autres institutions gouvernementales, ayant vu le bien que Dragnet a fait au LAPD, se mettent aussi à la recherche de leur Joe Friday.

En 1965, la chaîne nationale de télévision ABC lance ainsi la série The F.B.I, s’inspirant de vrais cas de l’agence fédérale. Le casting et les épisodes doivent être approuvés directement par J. Edgar Hoover, le directeur du FBI de l’époque, ou à défaut son bras droit, Clyde Tolson. Cherchant toujours plus de contrôle sur l’image que la série renvoie de son agence, Hoover vérifie les antécédents criminels et politiques de chaque acteur auditionnant. Il veut être sûr qu’un agent fédéral ne soit jamais joué par un criminel ou, aussi terrible selon lui, un communiste.

Les séries diffusées de nos jours ne sont plus relues et approuvées par un policier, tout au plus un policier consultant peut, si les boîtes de production le souhaitent, donner son avis sur la crédibilité des scènes. Il n’empêche qu’Hollywood a tout intérêt à ne pas trop froisser la police. Comme le souligne Jason Mittell, « si vous voulez tourner sur place, il vous faut une autorisation de tournage et que la police bloque la rue. C’est des petites choses comme cela qui nécessitent une relation proche entre les séries télés et les services de police. » Quitte à passer sous silence certains aspects de l’institution.

Les séries américaines ignorent ou justifient les crimes et les violences quand ce sont les policiers qui les commettent

La pratique est donc ancienne, la critique moins. En effet, le mot copaganda n’a commencé à être utilisé que très récemment. L’origine du mot est floue et on ne sait pas qui a inventé le terme. Il a probablement été utilisé pour la première fois par des activistes du mouvement Black Lives Matter sur les réseaux sociaux en 2015 ou 2016. 

Il n’a néanmoins gagné en popularité que l’année dernière pendant les manifestations suite au meurtre de George Floyd. Les manifestants l’ont utilisé pour expliquer pourquoi, malgré des violences policières ciblant les minorités étant monnaie courante aux États-Unis, la majorité des Américains semblaient avoir une bonne image de la police. Les activistes de BLM se sont alors rendu compte que dans la bataille de l’image, probablement aussi importante que celle dans la rue ou aux tribunaux, la police avait des décennies d’avance. 

Pour eux, la copaganda, qu’elle soit dans les journaux télévisés ou dans les séries télévisées, est complice. En représentant les policiers comme des héros et la police comme une institution juste, honnête et bonne, elle donne une image complètement biaisée de la police au public. Pire encore, elles banalisent et justifient des actions commises par des policiers, qui, dans la vraie vie, seraient illégales. 

L’association Colors of Change Hollywood dont le but est de rendre les médias « moins hostiles » aux personnes noires, a publié en 2020  un rapport de plus de soixante-dix pages intitulé « Banaliser l’injustice : les représentations erronées dangereuses qui définissent les séries policières ». Ils étudient notamment le comportement moral et légal des personnages policiers dans vingt-six séries policières. Pour cela, le rapport présente une comparaison entre le nombre de crimes ou de manquements aux procédures commis à l’écran par un policier considéré dans la série comme un « mauvais flic » (interroger quelqu’un sans lui laisser le droit à un avocat ou fouiller une maison sans mandat par exemple) à celui des personnages principaux considérés comme des « bons flics ». Dix-huit séries sur les vingt-six étudiées montraient les « bons flics » enfreindre la loi plus souvent qu’elles ne montraient les « mauvais flics » enfreindre la loi. Néanmoins les trois quarts du temps, les mauvaises actions commises par les personnages principaux n’étaient pas reconnues comme telles, laissant l’impression qu’elles étaient normales et légales. Quand les personnages reconnaissaient que ce qu’ils venait de faire était illégal, ils avaient toujours un moyen de le justifier, sous-entendant que, quand un policier commet une infraction ou un crime, c’est pour le bien de tous. 

Colors of Change Hollywood a aussi remarqué que les mauvaises pratiques policières racialement motivées, notamment le délit de faciès, n’étaient tout simplement pas représentées. Dans les séries, les personnes blanches étaient toutes autant victimes de violences policières que les personnes noires. Dans la vraie vie, une étude d’Harvard a prouvé que les personnes afro-américaines avaient trois fois plus de chances de se faire tuer par la police que les personnes blanches. Une manière de cacher, ou du moins de ne pas aborder, les problèmes de racisme qui accablent la police américaine depuis ses débuts. 

Pour Colors of Change Hollywood, les conclusions sont claires : en montrant les héros, les personnages auxquels nous sommes censés nous attacher, commettre des crimes et des vices de procédures, les séries les font passer pour quelque chose de normal, nécessaire et complètement compréhensible, presque sympathique. En faisant cela, les personnes les regardant pourraient être moins susceptibles de réagir négativement quand les policiers de la vie réelle commettent ce genre d’actions. Voire de les encourager et de penser que, comme leurs héros, ils font partie des policiers qui ont tellement soif de justice qu’ils ne laissent rien, pas même les lois ou la constitution, les arrêter. En ne représentant pas les violences policières comme visant plus les personnes issues des minorités, les séries laissent penser aux personnes qui les regardent que ces communautés ne sont pas plus visées par les violences policières, et donc que les mouvements de protestations sont une réaction excessive. Et en ne remettant jamais en cause le système policier actuel, elles laissent penser qu’aucun changement n’est nécessaire, et qu’il n’y a de toutes façons pas d’alternatives à ce qui est en déjà en place. 

Hollywood appelle Hollywood à changer

Plus de 300 acteurs, actrices et personnalités afro-américains d’Hollywood ont dénoncé les relations qu’entretiennent les studios avec la police en juin 2020. Ils ont demandé à ne plus s’appuyer sur la police lors de tournages et de cesser « d’ériger des officiers et des agents qui sont brutaux et agissent en dehors de la loi en héros ». Un appel qui pourrait menacer les séries policières, friandes de l’archétype du « flic anti-héros dur à cuire ».

Les manifestations qui ont suivi la mort de George Floyd ont poussé tout Hollywood, et pas seulement les acteurs issus de minorités, à se remettre un peu en question. Comme l’explique Jason Mittell : « Le soutien pour le mouvement était très fort durant l’été 2020. Et il y avait une vraie envie pour les producteurs d’Hollywood, la plupart étant d’ailleurs progressistes, d’évoluer. »

Certaines séries ont d’ailleurs changé après cet été. Brooklyn Nine-Nine par exemple, est sûrement la production pour laquelle les différences entre l’avant et l’après 2020 sont les plus frappantes. Cette comédie policière de Mike Schur (The Office US, Parks and Recs) met en scène des policiers issus des minorités ethniques ou sexuelles, parfois même des deux. Son public, plus jeune et de gauche que celui d’autres séries policières, a été particulièrement sensible au mouvement Black Lives Matter. Brooklyn Nine-Nine a sûrement été la série qui revenait le plus souvent dans les discussions autour de la copaganda

Le premier épisode de la huitième et ultime saison s’ouvre avec Rosa Diaz (Stephanie Beatriz) annonçant sa démission et son envie d’aider les victimes de violences policières. Nous sommes loin du personnage qui préconisait durant l’épisode deux de la première saison de donner « une raclée, et une bonne, avec un bottin » à un suspect mineur parce qu’il avait dégradé des véhicules de la police. Une évolution de personnage qui annoncerait la série policière de demain ? 

La fin des séries policières telles qu’on les connaît ? 

Jason Mittell en doute : « Si vous regardez l’audience des séries policières les plus populaires, comme Blue Bloods ou autres, vous verrez qu’elle est beaucoup plus vieille, blanche et rurale que les autres séries. » Une audience « similaire au spectateur moyen de Fox News », peu encline à vouloir remettre en cause la police, mais qui, « pour CBS (chaîne de télé américaine produisant entre autres Blue Bloods, S.W.A.T et NCIS), est aussi valide que les autres ».

Il suffit de voir la onzième saison de Blue Bloods, tournée après les manifestations de 2020, pour se rendre compte que la prise de conscience n’a au final été que très limitée. Cette série commencée en 2010 suit la famille Reagan, policiers de père en fils depuis au moins trois générations. Si elle engendre moins de memes que Brooklyn Nine-Nine, elle est beaucoup plus suivie. Selon le Hollywood Reporterelle réunit environ dix millions de téléspectateurs par épisode, contre deux millions et demi pour la sitcom policière. Dans le premier épisode de la nouvelle saison, Frank Reagan (Tom Selleck), le préfet de police de New York, menace de démissionner après que Regina Thomas (Whoopie Goldberg), la présidente du Conseil de New York City, ait dit que des “criminels” sont présents dans les rangs du NYPD. Une représentation du flic diamétralement opposée à celle de Brooklyn Nine-Nine, n’acceptant aucune critique de la part de civils et pensant sincèrement que la police est une institution sans faille. 

Selon Jason Mittel : « Les séries policières vont probablement changer en surface. Il y aura une plus grosse diversité dans les forces de police, peut-être un ou deux épisodes par saison qui traiteront des violences policières ». Mais difficile, à son avis, d’imaginer de plus gros changements pour un genre si codifié et populaire : « Vous savez, le genre policier, c’est rassurant, on voit quelqu’un enfreindre la loi et la justice être rendue à la fin. Beaucoup de personnes veulent voir cela à la télé. Et juste pour eux, je ne pense pas qu’il faille, même sur le long terme, s’attendre à autre chose que des changements superficiels. »


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USA : les émeutes feront-elles avancer le combat antiraciste ?

Incendie d’un commissariat de Minneapolis suite à la mort de George Floyd. © Hungryogrephotos

L’émeute est une réponse rationnelle à la pauvreté écrasante et à l’oppression. Et bien que ce ne soit pas toujours le cas, des recherches montrent que les émeutes peuvent effectivement permettre des conquêtes sur le plan social. Donnant de la visibilité à des causes minoritaires, elles leur ouvrent la voie vers la conquête de l’hégémonie. Article de notre partenaire américain Jacobin traduit par Myriam Nicolas et édité par William Bouchardon.


Les progressistes américains ont une relation particulièrement contradictoire avec les manifestations anti-raciste. D’une part, les progressistes de gauche s’imaginent être les meilleurs amis de la cause de la lutte contre les discriminations. D’autre part, ils ont cependant pris leurs distances avec le militantisme anti-raciste, au moins depuis les années 1930, convaincus qu’il ne mènerait qu’à un renforcement de l’influence des réactionnaires. À l’heure où des dizaines de villes à travers les États-Unis sont secouées par des soulèvements massifs, cette incohérence des progressistes américains s’est de nouveau manifestée ouvertement.

Certaines tentatives de maintenir un équilibre entre soutien à la cause et condamnation des émeutes étaient tout bonnement ridicules, comme par exemple l’idée, grotesquement paternaliste, que la destruction de biens matériels était exclusivement le fait « d’anarchistes blancs ». En plus de recycler l’excuse sur laquelle la police se base pour réprimer les manifestations, ce genre d’argument a pour résultat de nier les nombreuses formes de protestation des afro-américains qui ne rentrent pas dans le moule cautionné par la gauche progressiste.

D’autres penseurs ont trouvé des manières plus subtiles d’exprimer leur inconfort vis-à-vis des soulèvements en avançant l’idée que les émeutes, même lorsque celles-ci pouvaient être justifiées sur le fond, ne faisaient que renforcer le camp réactionnaire. Par un alignement des planètes imprévu, les émeutes ont coïncidé avec la sortie d’un article du chercheur en sciences politiques Omar Wasow défendant l’idée selon laquelle les émeutes des années 1960 auraient conduit à l’arrivée de Nixon au pouvoir en effrayant les électeurs blancs.

Sur le fond, l’article de Wasow est un travail rigoureux de sciences sociales, et ses conclusions ne peuvent être validées ou rejetées selon qu’elles arrangent ou non les militants les plus radicaux. Il est en effet tout à fait possible que les soulèvements des années 1960 aient gonflé le soutien à la campagne de Nixon, qui promettait de restaurer « la loi et l’ordre ».

Or, cet article a reçu beaucoup d’attention dernièrement de la part de personnes cherchant à en tirer des conclusions bien au-delà de ses fondations empiriques. Ross Douthat, un chroniqueur conservateur au New York Times qui parvient à parfaitement articuler sa pensée avec les poncifs progressistes, s’en est servi pour avancer que la gauche progressiste a « une responsabilité particulière d’empêcher et de contenir » les émeutes si elle souhaite éviter des conséquences politiques encore plus incertaines. 

Il y a trois semaines encore, les progressistes condamnaient les extrapolations imprudentes de l’administration Trump, mais ils se prêtent désormais au même genre d’exercices en faisant des conséquences contre-productives des émeutes des années 1960 une règle absolue qui disqualifie à jamais l’émeute comme moyen d’action politique. L’idée que les effets d’une émeute différent selon le contexte est d’une complexité qu’ils préfèrent ne pas envisager.

Les résultats des enquêtes d’opinion suggèrent fortement que les émeutes de Ferguson et Baltimore ont contribué au développement d’idées plus progressistes au sujet de la lutte contre les discriminations.

Prenons les premiers soulèvements du mouvement Black Lives Matter (BLM) qui eurent lieu en 2014 et en 2015 à Ferguson, dans l’état du Missouri, et à Baltimore, dans l’état du Maryland. Selon Douthat, ces soulèvements mirent fin à l’enthousiasme des conservateurs en faveur de la réforme du système pénitentiaire (il ne s’agit pas ici d’une réforme précise de l’administration, mais plutôt de l’idée de repenser le système pénitentiaire américain pour le rendre plus humain, N.D.L.R.) et participèrent à l’avènement de Trump. 

Les éléments venant cautionner ce raisonnement sont cependant quasi-absents. De fait, les résultats des enquêtes d’opinion suggèrent fortement que ces épisodes ont contribué au développement d’idées plus progressistes en matière de lutte contre les discriminations. Durant la dernière décennie, le Pew Research Center a demandé aux gens s’ils pensaient que le pays avait suffisamment œuvré en faveur de la lutte anti-raciste, ou s’il fallait en faire plus. Il suffit de consulter les résultats des enquêtes pour que l’impact du mouvement Black Lives Matter apparaisse clairement. 

Enquête du Pew Research Center sur l’opinion des Américains à propos de la lutte contre les discriminations : en rouge, plus d’efforts sont nécessaires pour atteindre cette égalité, en jaune suffisamment d’efforts ont déjà été consentis pour que les afro-américains soient égaux.

Dans l’ensemble de la population américaine, la part d’individus exprimant l’idée que le pays devait encore évoluer pour garantir l’égalité des droits a fortement augmenté durant la période 2014-2015. Certes, l’ampleur de la croissance de ce sentiment est à peine plus faible si l’on prend uniquement en compte la population blanche, mais même les sympathisants du parti républicain ont été très nombreux à reconnaître que la lutte contre les discriminations demandait encore des efforts. Néanmoins, les mêmes enquêtes ont montré que 80% des membres de la police estiment qu’aucun changement supplémentaire n’est nécessaire pour atteindre l’égalité entre citoyens de différentes couleurs. D’autres recherches académiques ont documenté l’impact du mouvement BLM de manière plus rigoureuse et approfondie. 

Dans l’histoire récente des soulèvements populaires, Ferguson et Baltimore ne font pas figure d’exceptions. Les exemples démontrant que des émeutes ont impulsé des changements progressistes ne manquent pas. Par exemple, un article récent a démontré que les émeutes de 1992 en soutien à Rodney King à Los Angeles (afro-américain passé à tabac après une course-poursuite en 1991, N.D.L.R.) ont renforcé la mobilisation des électeurs en faveur du parti démocrate ainsi que le soutien apporté à l’éducation publique. 

En Grande-Bretagne, des émeutes éclatèrent en 1990 lorsque Margaret Thatcher essaya d’imposer un nouvel impôt local incroyablement régressif, la « poll tax » (le montant de cet impôt local était le même pour tout le monde, quelque soit son niveau de richesse, N.D.L.R.). Si la majorité des membres du parti travailliste ont alors condamné les émeutes comme étant le fait d’anarchistes, la campagne de soutien aux personnes condamnées durant les émeutes deviendra finalement une composante importante du mouvement de lutte contre la « poll tax ». Cette mobilisation impulsée par la société – et non par les partis – provoqua une crise au sein du parti conservateur qui conduira finalement à la démission de Margaret Thatcher ainsi qu’à l’abandon de cet impôt. 

Le récit fait par certains progressistes des années 1960, où des électeurs blancs terrorisés auraient voté pour Nixon, est lui aussi plus compliqué qu’il n’y paraît. Tout d’abord, il a été prouvé que le gouvernement a été contraint d’investir plus d’argent public dans les villes défavorisées où les émeutes avaient éclatées. Dans son ouvrage précurseur Black Violence, publié en 1978, James W. Button révèle la manière dont les émeutes forcèrent les responsables politiques à porter davantage d’attention aux effets de leur politique sur les populations urbaines défavorisées, un groupe dont il ne se préoccupaient nullement auparavant. À une époque où de nombreux chercheurs en sciences sociales allaient jusqu’à considérer les mouvements contestataires comme symptômes d’une sorte de psychose de masse, Button montra que les émeutes étaient en fait des réponses rationnelles face à la négligence des gouvernants. 

Des recherches plus récentes ont dévoilé que les émeutes pouvaient conduire ces derniers à augmenter les investissements publics, y compris dans les lieux où le racisme des populations blanches étaient le plus fort. Autrement dit, même si les émeutes ont contribué à orienter l’opinion publique des américains blancs en faveur du conservatisme, elles ont également bénéficié aux quartiers où elles ont eu lieu. 

Si les effets politiques des émeutes sont plus complexes que ce que la morale progressiste suggère, celle-ci se trompe sur un point en particulier : quelles que soient leurs retombées politiques, des émeutes ont en fait lieu assez régulièrement dans les villes américaines. Lorsque des gens se trouvent dépossédés, lorsque leurs vies apparaissent chaque jour comme étant insignifiantes dans des vidéos qui les montrent se faire tuer par des agents de l’État, et lorsque le système politique ignore complètement leur détresse, ces gens-là vont, tôt ou tard, tenter d’imposer leurs problèmes sur le devant de la scène nationale, et ce par n’importe quel moyen. 

Comme l’a déclaré la chanteuse Cardi B dans une vidéo détonnant par son ton direct et son honnêteté : « En voyant des gens piller et s’indigner comme jamais, je me dis “Ces salauds vont enfin nous écouter maintenant.” » Bien que la gauche progressiste américaine ne cesse de rappeler l’importance qu’il y a d’écouter ce que les gens ont à dire dans de tels moments, elle a clairement démontré qu’elle ne souhaitait pas appliquer ce conseil à elle-même.


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« Les violences policières n’ont été que le détonateur des soulèvements aux États-Unis » – Entretien avec Alex Vitale

Manifestation contre les violences policières et le racisme devant la Maison Blanche le 3 juin à Washington D.C. © Ted Eytan

Pendant des années, les seules réponses à la brutalité de la police aux États-Unis ont été les caméras-piétons et des formations sur les préjugés pour combattre le racisme. L’embrasement généralisé du pays après le meurtre de George Floyd par un policier de Minneapolis prouve que ces dispositifs sont loin d’être suffisants. Alex Vitale, professeur de sociologie, coordinateur d’un projet articulant police et justice sociale au Brooklyn College et auteur de « The End of Policing » (La Fin du maintien de l’ordre) estime que la seule manière d’avoir une meilleure police est d’en avoir moins. Il prône le « définancement » de la police. Interview par notre partenaire Jacobin, traduite par Romeo Ortega Ramos et éditée par William Bouchardon.


Meagan Day (Jacobin) – On constate le retour des manifestations contre la brutalité policière en ce moment, alors que la pandémie COVID-19 bat son plein (les États-Unis ont enregistré plus de 100.000 décès liés au coronavirus, ndlr) et qu’une grande partie du pays est toujours théoriquement en confinement. C’est très surprenant. Je ne m’attendais même pas à voir des gens manifester massivement contre la gestion inadéquate du coronavirus et encore moins protester contre les violences policières liées au racisme. Comment interpréter tout cela?

Alex Vitale – C’est assez déroutant, oui. Je pensais moi aussi que les impératifs de distanciation sociale réduiraient considérablement les manifestations de rue. Mais nous traversons une période de crise profonde qui va bien au-delà de la police. La crise du coronavirus et la récession économique à venir (à la date du 21 mai, 39 millions d’Américains avaient déjà perdu leur emploi suite aux conséquences de l’épidémie, ndlr) jouent un rôle dans ce à quoi nous assistons. C’est la convergence d’un tas de facteurs différents. La brutalité de la police, phénomène qui n’a jamais été résolu, n’en est que le catalyseur. Cela a déclenché une sorte d’activisme générationnel en réponse à une crise plus profonde, dont la police fait partie et est emblématique.

Jacobin – Je vois tous types de personnes aux manifestations : des noirs précaires ou pauvres, mais aussi des jeunes blancs, dont beaucoup sont probablement issus de la classe moyenne. Cela semble valider ce que vous dites, à savoir que les manifestations sont motivées par une colère à la fois vis-à-vis des violences policières envers les noirs en particulier, et contre une plus grande diversité de phénomènes sociaux.

Alex Vitale – Je pense que nous avons sous les yeux les vestiges d’Occupy Wall Street, de Black Lives Matter et de la campagne Sanders, des mouvements unis par le sentiment que notre système économique ne fonctionne pas. Même les personnes qui n’ont pas personnellement subi de violence policière sentent venir un avenir d’effondrement économique et environnemental. Ils sont donc terrifiés et en colère. Si nous avions une économie en plein essor ou un leadership crédible à Washington, les évènements n’auraient pas eu une telle ampleur. Mais non seulement Trump est à la Maison Blanche, mais en plus personne n’a confiance en Biden pour régler ces problèmes.

Quand on pense aux soulèvements urbains des années 1960, on ne les associe pas uniquement aux méthodes policières. On comprend que les incidents policiers ont été un détonateur mais qu’ils étaient avant tout une réponse à un grave problème d’inégalité « raciale » et économique en Amérique. C’est ainsi que nous devons comprendre ce qui se passe aujourd’hui. La police est le visage de l’incapacité de l’État à subvenir aux besoins fondamentaux des gens et à vouloir masquer cet échec par des solutions qui ne font que nuire davantage.

Jacobin – C’est un peu surprenant mais ces manifestations semblent avoir une intensité supérieure aux précédentes manifestations « Black Lives Matter ». Il se passe la même chose qu’à Ferguson et à Baltimore mais dans des centaines de villes. Comment l’expliquer ?

Alex Vitale – L’une des raisons pour lesquelles ces contestations soient plus intenses aujourd’hui qu’il y a cinq ans, c’est qu’il y a cinq ans, on a dit aux gens : « Ne vous inquiétez pas, nous allons nous en occuper. Nous allons former les policiers à la question des préjugés implicites. Nous allons avoir des réunions de quartier. Nous allons équiper les policiers de caméras-piétons et tout ira mieux. » Et cinq ans plus tard, ce n’est pas mieux qu’avant. Rien n’a changé. Les gens n’écoutent plus ces niaiseries sur les réunions de quartier.

Minneapolis est une ville libérale au meilleur et au pire sens du terme. Il y a cinq ans, ils ont pleinement adhéré à l’idée qu’il suffirait de réunir les gens pour parler ensemble du racisme pour régler les problèmes de leur police. Tout ce genre de tactiques pour rétablir la confiance de la communauté dans la police, ils les ont essayées. Et en même temps, les policiers pouvaient continuer à mener la guerre contre les drogues, une guerre contre les gangs et le crime et criminaliser la pauvreté, les maladies mentales et les sans-abris.

Ce n’est pas juste Minneapolis. On a beaucoup entendu parler de cette idée qu’il fallait emprisonner les flics qui tuent. Mais c’est une stratégie sans issue. Déjà, tout le système juridique est conçu pour protéger la police. Ce n’est pas un accident ou un bug, c’est une caractéristique. Et après, lorsque des policiers sont poursuivis, le système les expulse et dit : « Oh, c’était une brebis galeuse. Nous nous en sommes débarrassés. Vous voyez, le système fonctionne. »

Les gens se rendent donc compte que ce type de réforme procédurale ne changera rien au fonctionnement de la police. Vous voulez des preuves de ce que j’avance ? Nous avons emprisonné un flic qui avait commis des meurtres à Chicago l’année dernière. Et vous ne voyez personne dans les rues de Chicago en ce moment se féliciter de la qualité des services de police.

Jacobin – De plus en plus de gens sont en train de prendre conscience que la police est ce qui nous reste quand nous ne disposons pas d’un État-providence décent. Êtes-vous d’accord que les gens associent de plus en plus leurs sentiments négatifs à l’égard de la police au désir positif d’un programme de réforme économique de grande ampleur ?

Alex Vitale – Absolument. Par exemple, nous avons vu des panneaux dans la rue la semaine dernière où était écrit « Defund the police » (« Ne financez plus la police », ndlr). Ce slogan incarne à merveille cette idée que nous n’allons pas rebâtir la police, mais bien que nous devons plutôt la réduire de toutes les façons possibles et la remplacer par des solutions démocratiques, publiques et non policières. Cette idée s’est construite depuis cinq ans, car plus les gens ont suivi les problèmes dans la police et de criminalisation (de la consommation de drogues par exemple, ndlr), plus ils se rendent compte directement à quel point ces réformes sont inutiles. De plus en plus de gens sont en train de réaliser que la voie à suivre est celle de la réduction de l’appareil policier et de son remplacement par des alternatives financées par l’État.

Par ailleurs, tout effort pour bâtir un mouvement populaire multiracial doit intégrer dans son programme la réduction de la machine carcérale de l’État. L’incarcération et la criminalisation de masse constituent une menace directe pour tous nos projets politiques. Cela fomente la division raciale, sape la solidarité, sème la peur, réduit les ressources à notre disposition, place les militants dans des positions précaires et mettra toujours à mal nos mouvements.

« Tout effort pour bâtir un mouvement populaire multiracial doit intégrer dans son programme la réduction de la machine carcérale de l’État. L’incarcération et la criminalisation de masse constituent une menace directe pour tous nos projets politiques. »

Les réformateurs procéduriers sont enfermés dans une vision mythifiée de la société américaine. Ils croient que l’application professionnelle et neutre de la loi est automatiquement bénéfique pour tout le monde, que l’état de droit nous rend tous libres. C’est une méconnaissance flagrante de la nature des structures juridiques dans lesquelles nous vivons. Ces structures ne profitent pas à tous de la même manière. Il existe un célèbre dicton du XIXe siècle qui parle de « la majestueuse égalité des lois, qui interdit au riche comme au pauvre de coucher sous les ponts, de mendier dans les rues et de voler du pain ». Mais bien sûr, les riches ne font pas de telles choses. Seuls les pauvres le font.

En fin de compte, le maintien de l’ordre consiste à maintenir un système de propriété privée qui permet de poursuivre l’exploitation. C’est un outil pour faciliter les régimes d’exploitation depuis la fin du XVIIIe et le début du XIXe siècle. Lorsque la plupart des forces de police modernes ont été formées, il s’agissait du colonialisme, l’esclavage et l’industrialisation. La police a émergé pour gérer les conséquences de ces systèmes – pour réprimer les révoltes d’esclaves, pour réprimer les soulèvements coloniaux, pour forcer la classe ouvrière à se comporter comme en main-d’œuvre stable et docile.

C’est la nature fondamentale du maintien de l’ordre. C’est une force qui n’a jamais été intéressée par l’égalité, bien au contraire. Elle a toujours existé pour réprimer nos mouvements et permettre à l’exploitation de se poursuivre.

Jacobin – A quoi ressemblerait le « définancement » de la police concrètement ?

Alex Vitale – Dans la pratique, au niveau local, cela signifie essayer de construire un bloc politique majoritaire en allant sur le terrain pour obliger un conseil municipal à voter la réduction du budget de la police et réinvestir autant d’argent que possible dans les besoins des citoyens.

Par exemple, à New York, les Democratic Socialists of America (DSA, parti de gauche américain qui a connu un fort essor depuis les campagnes de Bernie Sanders et compte aujourd’hui environ 60.000 membres, ndlr) mènent un plaidoyer sur les questions de criminalisation depuis un certain temps. En ce moment, ils s’organisent pour que les élections municipales de l’année prochaine soient l’occasion d’un test décisif : que tous les candidats prennent position et se déclarent en faveur ou non d’une réduction du budget des services de police d’un milliard de dollars. Ils sont en train de mettre cette question en avant de façon pratique. Et cette semaine, quarante candidats aux élections municipales ont signé un engagement à définancer le NYPD, le département de police de New-York. C’est incroyable.

Je suis le coordinateur du Policing and Social Justice Project (projet sur la police et la justice sociale, ndlr), qui fait partie d’un mouvement à New York pour la justice budgétaire. Nous avons fixé cet objectif d’un milliard de dollars. D’autres groupes comme les Communities United for Police Reform et Close Rikers (mouvement pour fermer la prison de Rikers Island, ndlr) ont appelé à des réductions substantielles des services de police et à réinvestir cet argent dans les besoins locaux. Ensemble, nous participons tous à des auditions budgétaires, nous écrivons des éditos, nous avons publié une vidéo qui circule sur les réseaux sociaux et même acheté des créneaux publicitaires pour appeler à cette réduction d’un milliard. Nous menons un vrai effort pour définancer la police non pas en théorie mais en pratique.

Ensuite, il est important de faire pression pour réaffecter cet argent dans des initiatives qui peuvent réellement remplacer la fonction de la police. Par exemple, à New York, le Public Safety Committee (Comité de sécurité publique, ndlr) a donné une recommandation sur l’usage du budget de la police et d’autres comités recommandent des réallocations de ce budget à d’autres services, le tout avec un président du Comité du budget qui peut demander des conseils à différents sous-comités. Par exemple, le président du Comité du budget sur lequel nous faisons pression à New York pourrait dire au Comité de la sécurité publique : « Nous voulons que vous retiriez deux cents millions du budget de la police », puis il pourrait dire au Comité de l’éducation : « Vous avez une centaine de millions supplémentaires à investir mais je veux que vous les investissiez dans des conseillers et la justice réparatrice. »

Jacobin – Les sondages montrent systématiquement que même si de nombreuses personnes, en particulier les personnes de couleur et notamment les noirs, se méfient de la police, ils ne veulent pas nécessairement que le nombre de policiers dans leur quartier soit réduit. J’ai l’impression que ce paradoxe s’explique par l’association automatique entre police et sécurité : les gens veulent se sentir plus en sécurité et la police est la seule solution à la sécurité publique qui existe. Que pensez-vous de ce paradoxe et comment y remédier?

Alex Vitale – Je pense que c’est semblable à la situation de Bernie Sanders. Vous avez vu les sondages de sortie des urnes montrant que les gens aimaient les idées de Sanders mais ont voté pour Biden. Ils ont peur, ils ne sont pas prêts. Ils ont un intérêt à la conformité et ils ne font pas confiance à cette nouvelle donne, même s’ils la comprennent et y croient jusqu’à un certain point.

En ce qui concerne la police, nous avons affaire aux conséquences de quarante ans de discours expliquant aux gens que la seule chose qui peut régler un problème dans leur quartier – chiens errants, nuisances sonores, adolescents turbulents – c’est davantage de police. C’est la seule option. Donc, les gens ont été conditionnés à penser : « Si j’ai un problème, c’est un problème que la police doit résoudre. » Quand les gens disent qu’ils veulent plus de police, ils disent en fait qu’ils veulent moins de problèmes.

Nous devons vraiment sortir de cette façon de penser. Nous devons donner aux gens confiance en eux pour qu’ils exigent ce qu’ils veulent et leur fournir plus d’exemples de choses qu’ils pourraient exiger et qui rendraient leur voisinage plus sain et plus sûr. Beaucoup de gens admettent par exemple qu’un nouveau community center (lieu en commun pour tout un quartier, où sont organisés tous types d’activités, similaire à une MJC en France, ndlr), mais ils ne croient tout simplement pas que cela soit possible. Ils se disent : « C’est inutile de le demander, ils ne nous le donneront jamais. »

Nous devons proposer des alternatives concrètes. Par exemple, les appels en cas de crise de santé mentale sont devenus une partie importante de l’action quotidienne de la police à New York. Il y en a 700 par jour. Nous n’avons pas besoin de policiers pour faire ce travail, et en soit nous ne voulons pas que des policiers armés fassent ce travail parce que c’est dangereux pour les gens qui ont des crises de santé mentale. Nous devons créer un système non policier d’intervention pour ce genre de problème qui soit disponible vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Jumaane Williams (politicien américain porte-voix de la ville de New York) a demandé exactement cela à New York dans un excellent rapport très détaillé. La proposition consiste à prendre l’argent dépensé pour les appels de police en cas de crise et à le dédier à la prestation de services de soin des troubles mentaux.

Voilà une idée concrète pour une alternative au maintien de l’ordre. Nous avons besoin de plus d’idées de ce type pour inculquer un sentiment de possibilité et d’optimisme, et accroître l’imagination collective.


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