Mexique : comment Claudia Sheinbaum est sortie victorieuse de la guerre commerciale

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Claudia Sheinbaum lors de son meeting à Mexico en mars dernier

Entre menaces douanières et accusations de collusion avec le narcotrafic, Washington a relancé la confrontation avec le Mexique, son premier partenaire commercial. Mais la stratégie de tension a échoué. Multipliant les concessions symboliques sans céder sur l’essentiel, la présidence mexicaine a réussi à retarder, puis à neutraliser partiellement l’application des tarifs douaniers. Dans cet affrontement inégal, la puissance intermédiaire a imposé ses conditions — et mis en échec une diplomatie de l’intimidation. Par Kurt Hackbarth, traduction Albane le Cabec [1].

Au début du mois de mars 2025, un rassemblement mené par la présidente Claudia Sheinbaum a rempli la place centrale de Mexico. Il ne s’agissait pourtant pas du rassemblement d’un parti politique, d’une commémoration historique ou d’une allocution à la nation, mais d’un rassemblement d’unité nationale face aux menaces tarifaires du président américain Donald Trump. « J’ai dit que nous étions un gouvernement du peuple (…) et que chaque fois qu’il faudrait informer ou faire face à l’adversité, nous serions ensemble », a-t-elle commencé. « Nous venons d’un grand mouvement populaire qui a été créé sur des places publiques, et nous voilà de retour avec vous ».

La présidente a exposé l’objectif initial de la manifestation : annoncer des représailles douanières et des mesures non-tarifaires.

Après avoir passé en revue les événements des dernières semaines, Claudia Sheinbaum a fait le point sur les relations historiques entre le Mexique et les États-Unis : les invasions de 1846 et de 1914, mais aussi le refus des États-Unis de reconnaître les usurpations de Maximilien de Habsbourg au XIXe siècle et de Victoriano Huerta au début du XXe siècle. Elle a également mentionné les relations cordiales entre les présidents Franklin D. Roosevelt et Lázaro Cárdenas dans les années 1930. « L’histoire commune de nos pays est marquée par de nombreux épisodes d’hostilité, mais aussi de coopération et de compréhension », a-t-elle déclaré. « Nous sommes des nations en situation d’égalité ; ni plus, ni moins ! ”

Son discours s’est conclu par la présentation d’un plan d’action pour faire face à la guerre commerciale annoncée par Trump. Celui-ci se décline en cinq points. En premier lieu, elle préconise de dynamiser le marché intérieur mexicain, notamment en augmentant le salaire minimum et le bien-être de la population. Deuxièmement, le plan prévoit d’accroître l’indépendance énergétique et l’autosuffisance alimentaire. Troisièmement, il s’agit de promouvoir les investissements publics pour la création d’emplois, la densification du réseau routier et des systèmes de distribution d’eau, mais aussi pour la construction d’un million de logements sociaux et de deux lignes de train longue distance entre Mexico et la frontière.

Quatrièmement, la présidente recommande d’augmenter la production grâce au modèle de planification industrielle, plus connu sous le nom de « Plan México ». Enfin, elle annonce renforcer l’ensemble des programmes sociaux de la nation, entre autres par la mise en œuvre de trois nouvelles initiatives : l’abaissement de l’âge de départ à la retraite de soixante-cinq à soixante ans pour les femmes, des bourses d’études pour les élèves du primaire et du secondaire, et un programme de santé pour les personnes âgées.

En réalité, la grande force de ce rassemblement réside dans la diversité de son public. Celui-ci n’était pas seulement composé des sympathisants de son parti et des syndicats du secteur public. Au contraire, de nombreuses figures connues pour sympathiser avec l’opposition étaient présents : les gouverneurs et les chefs d’entreprise, ainsi que le président du puissant Conseil de coordination des entreprises. En plus de contribuer à porter la cote de popularité de Claudia Sheinbaum – qui atteint les 85 % selon plusieurs enquêtes d’opinion -, les tactiques d’intimidation de Donald Trump ont facilité ce qui était impensable auparavant : la création d’un large front populaire.

Des tarifs douaniers longtemps reportés

Alors que la première campagne de Donald Trump promettait de se concentrer sur les « violeurs » ou les bad hombres mexicains, la récente stratégie du président a jeté les bases d’un nouveau conflit avec le premier partenaire commercial des États-Unis. Outre les discours alarmistes désormais habituels sur les « frontières ouvertes » et les « clandestins qui votent aux élections », la campagne a également mobilisée un nouveau registre pour qualifier le voisin mexicain, comparant les flux migratoires entre le Mexique et les États-Unis de « bain de sang qui détruit le pays », rappelant que « chaque État est un État frontalier » et, de manière plus insidieuse, accusant les immigrés « d’empoisonner le sang du pays ». Trump a également menti à plusieurs reprises en affirmant que des constructeurs automobiles chinois tels que BYD Auto construisaient au Mexique « certaines des plus grandes usines automobiles du monde », alors que, comme l’a rapidement souligné Claudia Sheinbaum, la plus grande usine BYD d’Amérique du Nord se trouve en Californie.

Les tarifs douaniers peuvent être compris comme des pratiques coercitives, des sources de revenus, ou un moyen d’encourager la réindustrialisation états-unienne.

Ces attaques dispersées reflètent une confusion sous-jacente dans l’entourage de Donald Trump quant à la justification des droits de douane contre le Mexique. L’immigration ? Le fentanyl ? Le déficit commercial ? L’entrée clandestine des hommes et des marchandises sur le marché américain ? Ce manque de clarté se reflète dans le recours généralisé aux tarifs douaniers qui peuvent simultanément être compris comme des pratiques coercitives, des sources de revenus, ou un moyen d’encourager la réindustrialisation états-unienne.

Quelles que soient les raisons invoquées, Trump s’est empressé d’annoncer, le 25 novembre, que les droits de douane sur le Mexique et le Canada entreraient en vigueur dès le premier jour de son mandat. La présidente Sheinbaum a réagi rapidement en envoyant une lettre appelant à la coopération, dans laquelle elle avertissait qu’un droit de douane serait suivi d’un autre et rappelait au président Trump la responsabilité des États-Unis dans la consommation de drogue et le flux d’armes vers le sud.

Le jour de son investiture, pourtant, Trump n’annonce pas de droits de douane. C’est seulement plus tard qu’il déclare leur entrée en vigueur pour le 1er février. Dans sa « fiche d’information » accompagnant l’annonce, la Maison Blanche a évoqué des « liens intolérables entre les organisations de trafic de drogue et le Mexique »,  reprenant ainsi une accusation infondée colportée par des publications allant de ProPublica au New York Times dans une tentative flagrante d’interférer dans la campagne présidentielle mexicaine de 2024.

Ironie de l’histoire : l’un des articles utilisés pour étayer cette affirmation fait référence à Genaro García Luna, ministre de la Sécurité publique de l’administration conservatrice de Felipe Calderón et allié des États-Unis, décoré par la CIA, le FBI et la DEA avant d’être reconnu coupable de collusion avec le cartel de Sinaloa et condamné à une peine de trente-huit ans d’emprisonnement…

Juste avant l’entrée en vigueur de la mesure, Claudia Sheinbaum a toutefois annoncé, lors de sa conférence de presse matinale, que les deux pays étaient parvenus à un accord temporaire, reportant d’un mois l’application des tarifs douaniers. Celui-ci prévoyait que le Mexique envoie dix mille gardes nationaux supplémentaires à sa frontière nord, que les États-Unis répriment davantage le trafic d’armes, et que les deux pays mettent en place des groupes de travail sur la sécurité et le commerce. Pour une concession symbolique, la diplomatie de « la tête froide », selon l’expression de Sheinbaum, a remporté une première victoire.

Lorsque le deuxième round a commencé en mars, la présidente avait préparé ses chiffres : passages à la frontière et homicides en baisse, saisies de drogue en hausse, laboratoires de méthamphétamine démantelés, et vingt-neuf capos de la drogue remis par le Mexique à la garde des États-Unis, dont Rafael Caro Quintero, recherché depuis longtemps et accusé d’avoir commandité le meurtre d’un agent de la DEA en 1985. Peu importe : la Maison-Blanche a déclaré qu’elle allait quand même appliquer les droits de douane, en publiant une copie conforme d’accusations recyclées que Sheinbaum a qualifiées d’« offensantes, diffamatoires et sans fondement ». Le dimanche suivant, elle annonce une série de contre-mesures tarifaires et non tarifaires lors d’une assemblée publique au Zócalo. C’est le retour aux pourparlers.

Cette fois, Claudia Sheinbaum a négocié un nouveau sursis d’un mois pour les marchandises couvertes par l’accord États-Unis-Mexique-Canada, non pas avec de nouvelles concessions mais, comme l’a permis M. Trump, en raison de son « respect » pour son homologue mexicain, chaque délai diluant pourtant un peu plus la menace de tarifs douaniers.

L’art de la négociation asymétrique

Peut-être plus que tout autre pays, le corps diplomatique mexicain a une longue histoire de négociations asymétriques avec les États-Unis. Cela a parfois fait basculer la politique étrangère du pays dans l’excès de prudence, mais lui a également permis d’acquérir une grande expérience dans des situations similaires à celle d’aujourd’hui.

À cela s’ajoutent les compétences de Claudia Sheinbaum dans ce domaine. Pour une présidente qui, dès le début de sa campagne, a été critiquée pour son « manque de charisme » (ce qui relevait en grande partie d’une tentative peu subtile pour l’opposer à son prédécesseur, Andrés Manuel López Obrador), elle est devenue, en à peine six mois de mandat, un exemple international de diplomatie face à un Trump volatile et capricieux. Son sang-froid face aux menaces de guerre commerciale et d’invasion, à la désignation par Trump des cartels comme organisations terroristes étrangères et à une série de communiqués puérils du président américain lui ont valu les éloges de dirigeants aussi diamétralement opposés que Gustavo Petro et Olaf Scholz. Maîtrisant l’art de la diplomatie face à un adversaire grossier, la présidente a su trouver le juste milieu entre fermeté et souplesse, faisant des concessions à Trump, qu’il peut utiliser pour se déclarer victorieux, sans compromettre la position du Mexique dans les négociations futures.

Cela lui a valu des éloges répétés de la part de Trump lui-même, qui a ouvertement copié son idée de mener une campagne nationale de lutte contre le fentanyl. Alors que Justin Trudeau s’est rendu à Mar-a-Lago, que Keir Starmer, Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky ne se sont rendus à la Maison Blanche que pour y être congédiés rapidement, Sheinbaum est resté au Mexique, négociant, gouvernant et refusant de jouer les règles du jeu de son homologue états-unien. Retarder de quelques jours l’annonce de tarifs douaniers réciproques pour permettre un dialogue de dernière minute et l’organisation d’un rassemblement public se révèlent être une stratégie puissante, que la présidente devra de nouveau mobiliser dans le contexte de guerre commerciale tous azimuts amorcée par Trump.

Note :

[1] Article originellement publié par notre partenaire Jacobin sous le titre « Trump’s Tariff Threats Have Made Mexico’s President Stronger ».

« Nous assistons au meurtre graduel de Julian Assange par la torture psychologique » – Entretien avec John Shipton

Julian Assange © Telesur

Julian Assange est interné dans la prison de haute sécurité de Belmarsh depuis son expulsion de l’ambassade équatorienne en avril 2019. Les États-Unis réclament son extradition, où il est justiciable de 18 chefs d’accusation, qui pourraient lui valoir une peine de 175 ans de prison. Ses partisans se mobilisent pour sa libération. Nous avons rencontré John Shipton, le père de Julian Assange, qui compte parmi les personnalités les plus impliquées dans ce dossier. Entretien réalisé par Denis Rogatyuk, traduction de Florian Bru.


LVSL – Depuis le début des audiences consacrées à l’extradition de Julian Assange, le gouvernement des États-Unis, en particulier Donald Trump, Mike Pence et Mike Pompeo, redoublent d’attaques contre Wikileaks. Mike Pompeo l’a même qualifié de « service de renseignement non-étatique hostile, fréquemment manipulé par des acteurs étatiques comme la Russie ». L’establishment étasunien semble déterminé à l’extradition de Julian Assange, et les deux principaux partis jouent le jeu. Quelles sont les marges de manœuvre dont disposent les militants et journalistes aux États-Unis face à eux ?

[Pour une mise en contexte de l’affaire Assange, lire sur LVSL notre entretien avec Guillaume Long : « L’administration Trump sera impitoyable à l’égard d’Assange »].

John Shipton – Mike Pompeo est un secrétaire d’État lamentable, qui a déclaré la guerre à Wikileaks pour obtenir le soutien de la CIA afin de servir ses ambitions présidentielles futures. Il va sans doute quitter son poste de secrétaire d’État pour tenter de se faire élire sénateur du Kansas. Ce n’est pas que le poste de secrétaire d’État soit réellement d’une grande importance. Mike Pence, quant à lui, ne me fait pas l’effet d’une personnalité d’importance historique, étant donné que l’establishment étasunien doit toujours, en fin de compte, s’aligner sur ce que veut et pense la CIA.

Pompeo, dans son discours du 23 avril 2017, déclarait vouloir intimider les journalistes, les éditeurs et les publications du monde entier qui voudraient rendre publiques des informations gouvernementales. C’est notre pouvoir, en tant que membres du public, de discuter entre nous, de décider, par la conversation mutuelle, ce que nous devrions faire et comment nous devrions mener nos vies. Ils veulent que tout aille dans le sens de leur agenda, ils souhaitent pouvoir déclarer la guerre à n’importe quel pays – le Yémen, la Libye, l’Afghanistan, la Syrie, etc. Des millions de personnes réfugiées inondent le monde et arrivent en Europe. Le Maghreb est dans le chaos, le Levant est dans le chaos, des Palestiniens sont assassinés…

Tels sont leurs objectifs. Quant à nous, nous dépendons de vous pour nous fournir des informations véridiques, afin que nous puissions avoir une juste compréhension de la marche du monde. Ce que veut Pompeo, c’est que sa vision du monde soit celle de tous.

“Julian Assange constitue une singularité historique. Aucun journaliste, aucun éditeur, aucune publication n’a jamais subi d’assauts de cette intensité.”

Regardez l’Histoire : jusqu’à cinq millions de personnes depuis 1991 sont mortes des suites des guerres illégales des États-Unis et de leurs alliés au Moyen-Orient. Regardez Collateral Murder : vous voyez un bon samaritain traîner un homme blessé jusqu’à sa voiture, l’emmener à l’hôpital, prendre ses enfants sur le chemin de l’école… Il est tué sous vos yeux. Vous pouvez voir les pilotes de l’hélicoptère demander frénétiquement des instructions pour pouvoir tirer sur un homme blessé. Nous dépendons de vous, journalistes, éditeurs, publications, pour nous faire connaître les crimes que le gouvernement commet, de sorte que nous puissions nous soulever pour les empêcher.

Avec assez de détermination et d’énergie, nous pouvons réussir à empêcher la destruction d’un pays tout entier. À Melbourne, un million de personnes ont marché contre la guerre en Irak. Dans le monde, il y en a sans doute eu dix millions au total. Nous ne voulons pas de nouvelles guerres de cette nature, et il nous faut des informations pour pouvoir dire « non ».

LVSL – Comment agir face à la nouvelle « guerre froide » en cours entre les États-Unis et l’Union européenne d’un côté, la Chine et la Russie de l’autre ?

[Lire sur LVSL : « Arrestation de Julian Assange : la revanche de l’empire américain »].

JS – Je pense que le meilleur moyen est de parler et d’agir en-dehors des moyens de communication de masse – par des conversations en face à face. L’agitation qui a cours sur les réseaux sociaux est suffisante pour que Facebook, Youtube ou Twitter suppriment certaines publications, certains groupes ou certaines chaînes – comme on l’a vu ces dernières semaines. C’est de cela que nous avons besoin : que les gens ordinaires apprennent à se connaître les uns les autres et à discuter de questions politiques, sans dépendre de CNN ou d’une tête pensante pour savoir ce qu’ils devraient penser de tel ou tel sujet. Il faut juste parler à des amis, parler avec des groupes de gens, parler ensemble, échanger des idées, échanger des moyens d’obtenir de bonnes informations – et les choses changeront.

LVSL – Le combat pour la libération de Julian Assange constituait déjà un immense défi, mais il a été rendu plus difficile encore par son expulsion de l’ambassade équatorienne de Londres en mars 2019. Quelles sont les modalités qu’ont pu prendre votre combat depuis cet événement ?

JS – Julian Assange constitue une singularité historique. Aucun journaliste, aucun éditeur, aucune publication n’a jamais subi d’assauts de cette intensité. Nous assistons sous nos yeux au meurtre graduel de Julian Assange par la torture psychologique et la violation incessante des procédures qui lui étaient dues.

Julian Assange n’a pas pu assister à la dernière audition du fait de son état de santé dégradé ; la juge Baraitser a inversé la charge de la preuve, accusé Julian Assange de fuir le procès et exigé que l’on prouve cette dégradation. Encore une fois, on observe un processus récurrent en Australie : blâmer la victime. Les Australiens disent qu’ils ont offert une assistance consulaire ; cette assistance consulaire consiste à vous offrir les journaux de la semaine passée et à vérifier que vous êtes toujours vivant. C’est à peu près tout. Le DFAT [Ministère australien des Affaires Étrangères et du Commerce, ndlr] maintient pourtant qu’ils ont fait une centaine d’offres d’assistance consulaire. Si c’est le cas, c’est un profond témoignage d’échec : cela fait maintenant onze ans que Julian Assange est détenu arbitrairement.

Le groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire a déclaré que Julian Assange était détenu arbitrairement, et qu’il devrait être libéré et dédommagé sur-le-champ. Le dernier rapport date de février 2018. Nous sommes en 2020, et Julian Assange est toujours dans le quartier de haute sécurité de la prison de Belmarsh, à l’isolement, 23 heures par jour.

LVSL – Comment décririez-vous les liens entre la campagne actuelle pour sa libération et Wikileaks en tant qu’organisation ?

[Lire sur LVSL : « Julian Assange, un défi permanent lancé à l’ordre mondial dominant »]

JS – WikiLeaks poursuit son travail et continue à gérer la plus extraordinaire des bibliothèques de la diplomatie étasunienne depuis 1970. C’est un outil formidable, dans lequel tout journaliste ou historien, ou tout un chacun, peut chercher les noms de ceux qui ont été impliqués dans la diplomatie avec les États-Unis, que ce soit dans leur propre pays ou aux États-Unis. C’est une superbe ressource, qui continue à être entretenue.

Pas plus tard qu’il y a un mois, WikiLeaks a publié un nouvel ensemble de fichiers. Parmi les gens qui défendent Julian Assange et WikiLeaks, une centaine de milliers de personnes partout dans le monde travaillent sans relâche pour faire advenir sa libération. Il y a environ quatre-vingts sites internet dans le monde qui publient et militent pour la liberté de Julian Assange, ainsi que quatre-vingt  six pages Facebook qui lui sont dédiées ; nous sommes donc nombreux, et la hausse du soutien que l’on reçoit continue. Ce sera le cas jusqu’à ce que le gouvernement australien et le Royaume-Uni reconnaissent que la persécution de Julian Assange est le grand crime du XXIe siècle.

LVSL – Le dernier acte d’accusation de Julian Assange concerne sa supposée conspiration avec des hackers encore « anonymes » et semble être une tentative supplémentaire d’accélérer son extradition. Croyez-vous que c’est un signe que le Département de la Justice américain désespère ?

JS – Non, je ne le crois pas. Les gens qui travaillent au Département de la Justice sont payés, que cela réussisse ou non. Si Julian Assange est extradé ils toucheront leur salaire, s’il ne l’est pas ils le toucheront quand même.

Le Département de la Justice aimerait que le procès soit différé après les élections américaines [la justice américaine n’a cessé de délayer le procès de Julian Assange ; ses défenseurs y voient un moyen de l’affaiblir psychologiquement en prolongeant son internement dans la prison de haute sécurité de Belmarsh ndlr]. Les avocats feront donc appel au tribunal en arguant qu’ils n’ont pas eu le temps de s’adapter, et demanderont que le juge reporte la date de l’audition.

Mais je pense que c’est tout sauf un acte de désespoir.