Le maréchal Haftar, l’ancien joker américain bientôt maître d’une Libye en cendres

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Depuis l’éclosion de la seconde guerre civile libyenne en 2014, le maréchal Haftar s’est imposé comme l’homme incontournable du pays. Il ne s’agit pas d’un personnage neuf dans le monde politique libyen. Ancien protégé des États-Unis qui comptaient sur lui pour renverser le régime de Muhammar Kadhafi, il est aujourd’hui porté par des forces géopolitiques multiples et contradictoires. Retour sur un personnage au passé trouble dont le rôle aujourd’hui est bien loin du sauveur providentiel qui lui est assigné.

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Un passé trouble

Khalifa Haftar naît le 7 novembre 1943 à Syrte. Il s’agit d’un membre de la tribu des Ferjani, dont le fief se situe dans la région de sa ville natale, et qui est également la région des Gaddhafa, la tribu de Kadhafi. En Libye, l’appartenance tribale est un élément constitutif de l’identité de l’individu et joue très profondément sur les ressentis et les comportements des Libyens. Ainsi, le fait que Kadhafi et Haftar soient issus de deux tribus qui sont implantées dans le même territoire a un impact profond sur les relations entre les deux hommes.

En 1963, Haftar fait la connaissance de Kadhafi au sein de l’armée royale libyenne (le régime en place est alors une monarchie). Très vite, le jeune militaire rejoint le colonel Kadhafi dans son entreprise de renversement de la monarchie : le 1er Septembre 1969, le roi Idris Ier est renversé et Muhammar Kadhafi prend la tête de l’État. Très vite, Haftar gravit les échelons du régime kadhafiste. Il s’illustre durant la guerre du Kippour (opposant Israël à l’Egypte du 6 au 24 Octobre 1973) à la tête d’un contingent de chars libyens. Quelques années plus tard, il est envoyé en Union Soviétique parfaire sa formation militaire.

Finalement, à l’aube des années 80, Haftar devient l’homme de confiance de Kadhafi. Il est le grand ordonnateur des expéditions militaires de Kadhafi au Tchad, alors que son régime maintient une présence dans la bande d’Aozou. Il s’agit d’une portion de territoire de 100km de long à la frontière libyenne revendiquée par le régime kadhafiste. En 1976, Kadhafi envahit la bande et l’annexe. L’armée libyenne y maintient une présence constante.

Cependant, les ambitions kadhafistes d’une hégémonie libyenne sur son flanc sud se heurte aux français, désireux de maintenir leur domination dans leur ancien espace colonial. La force libyenne est rapidement dépassée par les Tchadiens appuyés par les Français et les Américains, et Haftar est fait prisonnier à N’Djamena en Avril 1987. Prisonnier des tchadiens, Haftar renie son ancienne allégeance à Kadhafi, et organise une « force Haftar », appuyée par ses nouveaux alliés tchadiens et occidentaux, dans le but de renverser Kadhafi. En 1990, Haftar sera chassé du Tchad par un Idriss Déby désireux de ne pas trop froisser son puissant voisin du nord.

Haftar devient, à ce moment, l’un des opposants les plus importants à Kadhafi, et devient lié aux intérêts américains dans la région.

Haftar devient, à ce moment, l’un des opposants les plus importants à Kadhafi, et devient lié aux intérêts américains dans la région. Il est vite extradé aux États-Unis où il réside près de Langley, en Virginie, lieu du siège de la CIA. Il tente bien un coup d’État en 1993 qui avorte rapidement. À partir de là, Haftar n’est plus actif politiquement tandis que les américains le voient comme un joker de réserve prêt à être déployé dès que le moment sera venu.

Le retour d’Haftar

L’éclatement de la guerre civile en 2011 voit le « joker Haftar » revenir dans le jeu libyen avec la bénédiction des Américains. Très vite, il devient l’une des figures emblématiques de la rébellion au niveau militaire. Après la mort de Kadhafi le 20 octobre 2011, Haftar est à deux doigts de devenir chef d’État-major de l’armée, mais il est bloqué par les islamistes qui y voient les intérêts américains propulsés au plus haut sommet de l’armée. Désavoué par le conseil national de transition (CNT), Haftar se retire de toutes ses fonctions militaires, puis, retourne dans sa maison en Virginie. De 2011 à 2013, il reprend donc son rôle de « joker » au service des américains.

En 2014, Haftar revient dans le jeu politique libyen. Devant l’incapacité de l’État à unifier les groupes armés qui sont issus de la première guerre civile, Haftar se donne pour mission de réaliser cette tâche. Le but est clair : il s’agit de détruire les coalitions islamistes qui contrôlent des pans entiers du territoire libyen. L’objectif est de stopper l’élan d’Al Qaida.

Haftar, malgré l’évidence, a toujours nié une tentative de coup d’État, et subordonne ses actions à la nécessité de la lutte contre le terrorisme qu’il utilisera toujours comme un épouvantail afin de justifier toutes ses actions.

Pour arriver à ses fins, Haftar ne lésine devant aucun moyen, quitte à remettre en question la légalité étatique. Le 14 Février 2014, il annonce le gel provisoire des fonctions du gouvernement et de la constitution. Le 18 Mai, ses forces attaquent le parlement de Tripoli tout en menaçant d’une offensive contre les islamistes de Benghazi. Haftar, malgré l’évidence, a toujours nié une tentative de coup d’État, et subordonne ses actions à la nécessité de la lutte contre le terrorisme qu’il utilisera toujours comme un épouvantail afin de justifier toutes ses actions.

À l’été 2014, la situation libyenne a tout d’un chaos inextricable : le gouvernement national d’accord (GNA à Tripoli), et le gouvernement de l’est à Tobrouk s’affrontent pour la direction de la Libye. C’est le début de la seconde guerre civile libyenne. Le sud voit s’affronter des milices Touaregs et Toubous dans une guerre inconnue mais très sanglante, tandis que le groupe Ansar al Sharia lié à Al Qaida annonce la formation d’un émirat islamique en Cyrénaïque. Cette année voit également l’organisation État islamique (OEI) établir une tête de pont à Derna en Cyrénaïque (est du pays).

Dans cette tourmente, Haftar s’impose comme l’une des figures militaires majeures du pays. Son « armée nationale libyenne » (ANL) supporte le gouvernement de l’est à Tobrouk, qui le lui rend bien : il est promu maréchal en septembre 2016. En théorie, il n’est que le chef militaire de la branche armée du Parlement de Tobrouk, l’ANL. En pratique, il se comporte comme un véritable chef d’État, et devient l’interlocuteur principal des acteurs locaux et des puissances étrangères au niveau diplomatique.

La contribution d’Haftar à la lutte contre le terrorisme est réelle bien que limitée. Il a en effet pacifié la Cyrénaïque en libérant Benghazi de l’emprise des islamistes et des djihadistes. De même, la ville de Derna, bastion d’Al Qaida et berceau du djihadisme libyen, passe sous le contrôle de l’ANL après un siège long et difficile. De la même façon, l’irruption de l’armée d’Haftar à l’hiver dernier dans le grand sud libyen lui a permis de décapiter le commandement d’Al Qaida dans la région dont les membres ne se cachaient pas et étaient connus publiquement. Pour autant, ses succès face à Daesh sont bien plus limités. Si Haftar a vaincu des éléments de Daesh coalisés avec d’autres groupes islamistes à Benghazi, il n’est pas à l’origine de la chute du bastion de terroristes à Syrte en décembre 2016. Ce succès revient aux brigades de Misrata, qui soutiennent le gouvernement d’union nationale de Fayez El Sarraj à Tripoli à l’ouest. Les troupes d’Haftar sont incapables d’évincer Daesh du centre du pays où le groupe a trouvé refuge auprès des tribus locales. Elles se montrent incapables de repousser les raids incessants de l’EI en direction des champs pétroliers depuis 2016, et ne trouvent pas de solutions, aujourd’hui, à une insurrection qui prend de l’ampleur dans le sud du pays. Désormais, les troupes de l’EI n’hésitent pas a attaquer les troupes de l’ANL dans le grand sud libyen au sein de leurs bases.

L’armée nationale libyenne, un colosse au pied d’argile

La grande armée d’Haftar, l’armée nationale libyenne (ANL), qui parait si redoutable sur le papier, ne résiste pas au choc de la réalité. Cette milice qui a bien réussi se base autour d’une composante forte, qui est la tribu d’origine d’Haftar, les Ferjani. Ce sont eux qui trustent la plupart des grands postes au sein de l’ANL, et qui tiennent l’armée au nom d’Haftar. D’emblée, nous nous trouvons devant un premier paradoxe : Haftar n’est pas né dans cette Cyrénaïque qui est le bastion de l’ANL, et apparaît comme un étranger aux yeux de la population. Les acteurs libyens de l’est du pays tolèrent donc la présence d’Haftar, tout en lui reconnaissant sa qualité de héros face à la menace djihadiste. Néanmoins, pour être véritablement ancrée dans l’est du pays, l’ANL doit trouver des figures lcales. Abelsallam al-Hassi, général considéré comme le « bras droit » d’Haftar, en est un bon exemple. Né dans l’est du pays, al Hassi s’est fait connaitre des Occidentaux dès 2011 ou il a officié en tant qu’agent de liaison entre l’armée rebelle et l’OTAN dans le cadre des frappes aériennes de l’alliance sur les positions kadhafistes. Il apparaît comme le successeur plébiscité par les occidentaux comme par la grande majorité de l’ANL.

Pour autant, une telle succession laisserait de côté la tribu d’Haftar, les Ferjani. S’ils occupent aujourd’hui des postes à responsabilité et constituent la tête de l’ANL, l’arrivée d’al Hassi au pouvoir va amener les membres de sa tribu, les Hassa, à revendiquer des postes. Il est peu probable que les Ferjani laissent le pouvoir leur échapper des mains. Ils sont emmenés par les fils du maréchal qui sont officiers dans l’armée, conseillers, ou lobbyistes vers l’étranger, tous, au service du clan familial et de sa tribu. Le grand favori des intérêts de la tribu Ferjani est Aoun Ferjani, conseiller proche du vieux maréchal.

Le maréchal Haftar a 75 ans et sa santé est déclinante. En Avril 2018, il a été hospitalisé à Paris après un accident cardiaque assez grave où il serait tombé dans le coma. La succession est donc clairement une affaire pressante au sein de l’armée nationale libyenne, mais peut déboucher sur des événements catastrophiques.

  • Si le clan d’Haftar, les Ferjani, sécurise la succession, les tribus de l’est emmenées par Al Hassi vont être écartées de la direction de l’armée, et donc se rebeller.
  • Si les Hassa passent, ce seront les Ferjani qui seront dans cette position.

Ainsi, la succession, au mieux, débouchera sur un affaiblissement interne de l’ANL qui perdra une partie de ses soutiens. Au pire, cela peut déboucher sur une guerre interne qui fera exploser l’ANL entre les tribus de l’est et du centre du pays.

Ainsi, la succession, au mieux, débouchera sur un affaiblissement interne de l’ANL qui perdra une partie de ses soutiens. Au pire, cela peut déboucher sur une guerre interne qui fera exploser l’ANL entre les tribus de l’est et du centre du pays. Néanmoins, la solution la plus probable serait un compromis momentané, car aucune des deux parties n’a intérêt à faire exploser cette armée. En effet, les tribus du centre du pays autour de la région de Syrte sont encore exposées aux raids de Daesh en provenance du désert libyen. De même, les forces de l’est du pays n’auraient aucun allié pour s’opposer aux makhdalistes, secte salafiste qui prend une importance de plus en plus forte dans la société libyenne.

Qu’Haftar annonce combattre l’islamisme et le djihadisme et s’acoquine avec une secte salafiste pour garantir la paix dans les zones sous son contrôle n’est qu’un des nombreux paradoxes auxquels le conflit libyen nous a habitués.

De même, le maréchal Haftar, s’il est indéniablement populaire en Cyrénaïque, doit composer avec des forces politiques bien définies pour éviter que son règne ne se délite. Les makhdalistes sont un bon exemple. Il s’agit de salafistes qui se sont ralliés à Haftar dans sa guerre contre le djihadisme. Leur ralliement a payé : il s’agit de la seule force salafiste à être véritablement puissante dans la Libye d’Haftar. Les frères musulmans ont été chassés de Cyrénaïque pour trouver refuge à l’ouest dans le gouvernement de Tripoli, tandis qu’Al Qaida et Daesh ont été chassés vers le désert libyen et le sud du pays. Haftar passe donc un accord avec ces salafistes : en échange de la paix sociale, les salafistes ont carte blanche pour développer leur prosélytisme et influer sur le travail législatif. Par exemple, en 2017, une loi a interdit les femmes de moins de 60 ans de prendre l’avion seules. Dans les mosquées, la présence des salafistes est tellement importante que les autres courants de l’islam sont obligés de passer dans la clandestinité. Le soufisme, un courant de l’islam centré sur la mystique, et historiquement très présent en Libye, est ardemment combattu. Qu’Haftar annonce combattre l’islamisme et le djihadisme et s’acoquine avec une secte salafiste pour garantir la paix dans les zones sous son contrôle n’est qu’un des nombreux paradoxes auxquels le conflit libyen nous a habitués.

Nous sommes encore devant une autre ironie de l’histoire : que celui qui ai trahit son mentor et participé à son renversement apparaisse aujourd’hui, pour nombre de kadhafistes, comme son héritier politique.

De même, le maréchal Haftar compte dans ses rangs de nombreux kadhafistes. Les kadhafistes sont encore très nombreux dans le pays. Ils soutiennent un pouvoir fort sur le modèle de la Jamahiriya arabe libyenne de Kadhafi, c’est-à-dire une dictature autoritaire et un État capable de maintenir la cohésion tribale du pays tout en excluant les étrangers du jeu politique interne. Les kadhafistes associés à Haftar voient, aujourd’hui, le vieux maréchal comme l’homme le plus à même de remplir ces critères. Il arrive à maintenir la cohésion tribale à l’intérieur de l’armée, domestique temporairement ses éléments salafistes, et joue des rivalités entre les grandes puissances afin de garder une autonomie relative. Pour autant, les kadhafistes n’oublient pas la trahison d’Haftar à l’égard de Kadhafi à la fin des années 1980, ni sa participation militaire au renversement du guide libyen en 2011. Nous sommes encore devant une autre ironie de l’histoire : que celui qui ai trahit son mentor et participé à son renversement apparaisse aujourd’hui, pour nombre de kadhafistes, comme son héritier politique. L’autre grande figure des kadhafistes, le fils de l’ancien dictateur, Saif al islam Kadhafi, est traité comme un paria par la société internationale et a peu de chances de revenir sans s’attirer les foudres des occidentaux.

Enfin le maréchal Haftar, en dehors de son bastion de l’est, tient les régions qu’il contrôle grâce à l’argent du pétrole. Ainsi, le pétrole de Cyrénaïque sert à acheter les différentes tribus libyennes du centre, qui laissent les forces d’Haftar passer au travers de leurs territoires. Les tentatives de pénétration d’Haftar dans cet espace ne sont pas nouvelles, mais les tribus se sont révélées être des adversaires trop forts pour le maréchal. Le pétrole permet donc ce que la force lui refuse. Néanmoins, cela n’empêche pas certaines de ces tribus d’abriter les éléments de Daesh qui officient depuis ces mêmes zones.
Le pétrole du centre du pays ainsi sécurisé par les troupes d’Haftar sert à alimenter le second niveau des conquêtes du maréchal, c’est-à-dire le sud du pays. Haftar déboule donc dans un espace libyen déjà fragmenté. Les tribus, milices, et organisations locales sont, pour la plupart, ralliées au maréchal. La résistance à l’armée nationale libyenne est donc faible. Néanmoins, les forces d’Haftar n’occupent que les grands axes routiers. Les Toubous (une ethnie à cheval entre le Tchad et le Niger), à l’est, et les Touaregs, à l’ouest, continuent à jouir d’un espace libre. La conquête, même imparfaite, du sud, permet à Haftar de sécuriser des gisements pétroliers. Ce pétrole, à nouveau, sert à paver les prochaines conquêtes. Les milices qui sont sur la route entre le sud du pays et la Tripolitaine sont à nouveau achetées. L’ANL peut donc déboucher directement au sud de Tripoli sans opposition forte.

Un pouvoir fragile

Néanmoins, la force de l’ANL au niveau économique est à mettre en exergue avec sa faiblesse militaire. Haftar n’a pas réussi à battre totalement les Touaregs et les Toubous. Il ne peut pas empêcher les attaques de Daesh sur ses arrières, dont l’insurrection a pris un coup d’accélérateur dans le grand sud libyen. Enfin, débouchant sur Tripoli, il s’est englué dans une guerre de tranchées qui s’éternise avec le gouvernement de Tripoli. On remarque donc que, dans tous les engagements militaires d’envergure, l’armée nationale libyenne n’est pas le rouleau compresseur que l’on croit.

La dimension internationale du conflit est donc un autre facteur de cette guerre civile, qui doit déjà composer avec ce mille-feuille ethnique, religieux, tribal et politique.

Pour le maréchal Haftar, la situation est donc beaucoup plus fragile qu’il n’apparaît. Les acteurs qui le soutiennent aujourd’hui sont soit achetés, soit partenaires dans le cadre d’un accord, soit soumis faute de mieux. Ses partenaires étrangers (France, Egypte, Russie Arabie saoudite, émirats arabes unis) l’appuient sans réserve, et fournissent au maréchal ce dont il a besoin pour maintenir son armée à flot et parachever la conquête du pays. Si le GNA n’était pas appuyé par l’ONU, la Turquie, le Qatar, l’Italie, l’Algérie et la Tunisie, Haftar serait déjà le grand gagnant de la guerre. Les Etats-Unis maintiennent des contacts avec les deux entités, mais penchent davantage du côté d’Haftar. La dimension internationale du conflit est donc un autre facteur de cette guerre civile, qui doit déjà composer avec ce mille-feuille ethnique, religieux, tribal et politique.

Son pouvoir provient donc de la force théorique de son armée, et de sa manne pétrolière, dont les installations en Cyrénaïque sont protégées par des mercenaires tchétchènes. Néanmoins, son armée est tellement faible que des mercenaires soudanais et tchadiens participent aux combats.

Dans ce cadre-là, une confrontation statique entre l’ANL et le GNA est un scénario auquel Haftar est clairement perdant en Libye.

Dans ce cadre-là, une confrontation statique entre l’ANL et le GNA est un scénario auquel Haftar est clairement perdant en Libye. Si l’ANL venait à essuyer une défaite, l’armée perdrait son prestige auprès d’acteurs qui n’auraient aucun intérêt à poursuivre une politique de connivence. Daesh a très vite compris les implications politiques de la guerre statique qui se poursuit au sud de Tripoli, en se posant comme le héraut de l’insurrection dans le grand sud libyen. Une poursuite du statu quo va donc probablement voir le grand sud libyen se détacher de l’ANL et retourner à son niveau antérieur : un espace partagé entre les Touaregs, les Toubous, les tribus, les milices, et – fait nouveau -Daesh.

Il y a donc de grandes chances qu’une poursuite des combats sans gagnants fasse perdre à Haftar la majorité des conquêtes qu’il a réalisées depuis l’hiver dernier, et le renvoie dans son bastion de l’est. Le gouvernement de Tripoli et lui-même le savent, ce qui résulte de combats particulièrement durs sur la ligne du front, avec utilisation de blindés, de l’aviation et de l’artillerie. Dans ce maelstrom, les civils et les migrants sont particulièrement touchés.

Même si Haftar prend Tripoli et devient le dirigeant d’un pays en cendres, la stabilité du pays est loin d’être acquise.

Même si Haftar prend Tripoli et devient le dirigeant d’un pays en cendres, la stabilité du pays est loin d’être acquise. Le maréchal est vieux, et les possibilités d’une guerre interne à l’ANL en cas de décès sont réelles. De même, la question du son rôle politique face aux institutions démocratiques se pose particulièrement. Enfin, l’accaparement des ressources du pays par les occidentaux est un secret de polichinelle, et il apparaît clairement que la Libye d’Haftar verra l’Occident mettre la main sur le pétrole libyen. Enfin, la force de la secte makhdaliste est difficile à contenir et peut devenir hors de contrôle. Bien sûr, dans le grand sud, Haftar n’a pas, et n’aura pas les moyens de faire de cette région autre chose qu’un pays d’occupation. Dans cette optique, Daesh continuera à se développer en l’absence d’État et de futurs pour les habitants de cette région.

Présenté comme un homme providentiel qui pourrait mettre fin à la guerre civile libyenne, Haftar n’en est finalement qu’un facteur d’aggravation.

Marie-Christine Vergiat : “L’UE ne prend pas sa part de l’accueil des réfugiés”

Marie-Christine VERGIAT est députée européenne, membre du groupe de la Gauche unitaire européenne au Parlement européen. Très engagée sur les questions de droits humains et auteure d’un rapport intitulé “Droits de l’Homme et migrations : quel rôle pour l’UE dans les pays tiers ?”, elle revient sur la crise de l’accueil des réfugiés et l’inhumanité des pays européens sur cette question.

LVSL – La migration est un enjeu politique majeur dans l’Europe actuelle. C’est de fait un point focal du débat public pour de nombreux pays, notamment en Europe de l’Est. Dans le dernier eurobaromètre de la Commission, l’immigration est présentée comme la première préoccupation des Européens. Comment abordez-vous cette place prépondérante qu’ont prise les migrations sur la scène politique européenne ? 

Marie-Christine Vergiat – Quand on parle des migrations, il faut d’abord se demander de quoi on parle. Effectivement, il y a une « focalisation » des débats assez malsaine et éloignée des réalités sur les migrations. Ces questions sont instrumentalisées à des fins politiques pour ne pas dire politiciennes pour alimenter les peurs et faire des migrants, ou du moins d’une partie d’entre eux, des boucs émissaires.

Il faut donc d’abord définir les termes du débat et rappeler que les migrations sont inhérentes à l’histoire de l’Humanité. De tout temps, les êtres humains se sont déplacés. Nomades à l’origine, ils sont devenus sédentaires, occupant de plus en plus d’espace sur la planète ; les uns cherchant à conquérir de nouveaux territoires poussant les autres vers d’autres contrées.

Dans la période moderne, les migrants sont ceux qui quittent un pays pour aller vivre dans un autre pour une durée supérieure à un an. Les Européens ont beaucoup migré, fuyant la misère tels les Irlandais, les Italiens ou encore les Polonais et les persécutions religieuses ou politiques comme les Protestants, les Juifs, les Italiens encore, les Espagnols, les Portugais, les Grecs et d’autres selon les époques.

Au moins 50 millions d’Européens ont ainsi quitté leur pays entre 1850 et la Première Guerre mondiale ; c’est le plus fort mouvement migratoire constaté dans l’Histoire moderne avant ceux de la Deuxième Guerre mondiale souvent évoqués. En 1900, on estimait le nombre de migrants à 5 % de la population mondiale contre 3,4 % aujourd’hui.

Marie-Christine Vergiat, en séance au Parlement Européen aux côtés de l’eurodéputé Patrick Le Hyaric.

La France a une histoire particulière car c’est le premier pays européen dont le solde migratoire a basculé, c’est-à-dire qu’il y a eu plus d’étrangers qui sont arrivés que de Français qui sont partis et ce, vers 1880, d’abord très majoritairement au profit d’autres Européens. Ainsi, près de 500 000 Italiens vivaient en France au début du XXème siècle et ils étaient 800 000 dans les années 30 avec l’arrivée de celles et ceux qui ont fui le fascisme. Et ce ne fut pas un long fleuve tranquille pas plus que pour les réfugiés espagnols pas vraiment tous accueillis à bras ouverts en 1939.

A partir de la Deuxième Guerre mondiale, les gouvernements français ont fait appel aux travailleurs des colonies pour « reconstruire la France » et notamment aux Algériens, aux Marocains et aux Tunisiens. À la fin des Trente Glorieuses au milieu des années 1970, avec la montée du chômage, les politiques changent mais l’immigration ne peut être totalement stoppée notamment pour raisons familiales conformément aux conventions internationales signées par la France.

Aujourd’hui, la France a un solde migratoire quasiment nul. Et la proportion d’étrangers qui y vivent, même si celle-ci connaît des mouvements d’oscillation, est relativement stable, et sa principale caractéristique est d’être de nouveau de plus en plus européenne.

“Il est curieux que ceux qui ne cessent de réclamer plus de libre circulation pour les marchandises, les capitaux et les services voudraient que les êtres humains soient cantonnés derrière des murs. C’est impossible et d’ailleurs contraire aux réalités.”

On est loin du grand remplacement tant en France qu’au niveau européen : le nombre de personnes résidant dans un État de l’Union et ayant la nationalité d’un pays tiers s’élevait, au 1er janvier 2016, à 20,7 millions, soit 4,1 % de la population de l’UE, auxquels il convient d’ajouter 16 millions d’Européens vivant dans un État autre que celui dont ils ont la nationalité.

Au niveau mondial, les migrants internationaux sont 244 millions dont 80 millions d’Asiatiques, 60 millions d’Européens et 35 millions d’Africains et alors que seulement 50 % des migrations européennes se font à l’intérieur du continent européen, 87 % des migrations africaines sont intra-africaines…

La principale évolution des migrations internationales est leur mondialisation, ou globalisation. Presque tous les pays du monde sont aujourd’hui à la fois pays de départ, d’accueil et de transit. C’est normal, c’est le pendant de l’évolution des moyens de communication et notamment de transports. En 1950, ceux qui pouvaient se déplacer d’un pays à un autre n’étaient que 50 millions. Aujourd’hui ils sont plus d’un milliard et ce chiffre ne cesse d’augmenter. Il est donc curieux que ceux qui ne cessent de réclamer plus de libre circulation pour les marchandises, les capitaux et les services voudraient que les êtres humains soient cantonnés derrière des murs. C’est impossible et d’ailleurs contraire aux réalités.

L’immigration est effectivement considérée comme le principal défi auquel l’Union européenne est confrontée par tous les citoyens européens mais pour ce qu’ils veulent voir pris en compte au niveau européen, car au niveau national c’est le chômage qui reste leur principal sujet de préoccupation.

LVSL – Si l’immigration n’est pas un phénomène nouveau, elle s’est imposée sur la scène médiatique et politique à partir de ce que d’aucuns appellent “la crise des migrants”. Vous vous refusez pourtant à parler de « crise migratoire » en Europe. Pourquoi ce choix sémantique et comment éviter l’instrumentalisation de cette question ?

Marie-Christine Vergiat – Je refuse de parler de crise migratoire car ce que l’on appelle ainsi n’est qu’une partie des réalités migratoires en Europe, et est avant tout une instrumentalisation de la situation difficile à laquelle ont été confrontées l’Italie et surtout la Grèce entre mai 2015 et avril 2016, période au cours de laquelle environ un million de personnes ont rejoint les côtes européennes au péril de leur vie dans des conditions souvent effroyables. L’UE, à de rares exceptions près, essentiellement l’Allemagne et la Suède, a refusé de leur ouvrir ses portes, c’est pourquoi je préfère parler de la crise de l’accueil des réfugiés.

Un million de personnes, c’est un chiffre important dans l’absolu mais c’est dérisoire par rapport à une population européenne de 500 millions de personnes et dans la zone géographique la plus riche du monde quand on totalise le PIB de l’ensemble de ses États membres. C’est pire si ces chiffres sont replacés dans le cadre de la crise mondiale des réfugiés qui concerne désormais près de 65 millions de personnes dans le monde.

Alors certes, la France et l’Union européenne ne sont pas là pour accueillir toute la misère du monde mais elles sont très loin de le faire et même d’y prendre leur part. Les personnes qui fuient les conflits se déplacent au plus près, d’abord à l’intérieur du pays concerné – les déplacés internes – puis vers les pays limitrophes.

C’est exactement ce qui s’est passé avec la Syrie où sur 12 millions de Syriens qui ont été obligés de quitter leur domicile 4,5 millions seulement ont quitté le pays et 90 % l’ont fait pour les pays limitrophes (Turquie, Jordanie et Liban). Au Liban, petit pays de 6 millions d’habitants, les réfugiés représentent environ 30 % de la population et nos gouvernements osent demander à ces pays d’en faire plus…

LVSL – Le mécanisme de solidarité et de relocalisation adopté par l’Union européenne en 2015 pour tenter de répartir entre les États membres l’effort d’accueil des réfugiés arrivés en Grèce et en Italie a fait couler beaucoup d’encre. Ce mécanisme a été mis en échec par le refus de certains États membres d’y participer. Il cristallise même dans certains pays le rejet de la politique européenne. Pensez-vous avec le recul que c’était la bonne stratégie à adopter ?

Marie-Christine Vergiat – Le mécanisme de relocalisation adopté en septembre 2015 par les États membres était un dispositif d’urgence. Il avait été proposé par la Commission européenne dès mai 2015 pour aider l’Italie et la Grèce et devait concerner 160 000 personnes sur deux ans, soit un chiffre très inférieur à la réalité des arrivées.

Dès le départ, des pays, et notamment la Hongrie et la Pologne ont effectivement refusé d’y participer mais l’immense majorité des États n’a pas fait beaucoup d’efforts puisqu’à l’heure du bilan, ce n’est qu’environ 30 000 personnes qui ont été accueillies, soit moins de 30 % de l’objectif fixé.

“La Pologne a été l’un des pays les plus virulents contre le mécanisme de relocalisation. Or, c’est celui qui accueille le plus de migrants économiques sur son territoire. En 2016, il a délivré 494 000 titres de séjour liés à l’emploi, soit 58 % des titres délivrés pour ce motif dans l’UE, et à 87 % au bénéfice d’Ukrainiens. C’est donc du dumping social et cela démontre l’absurdité de l’opposition entre réfugiés et migrants économiques.”

Donc, s’il y a bien des pays qui ont ouvertement contesté le dispositif dès le départ, il y en a d’autres qui, comme la France, ont pour le moins traîné les pieds (la France n’a respecté qu’à peine plus de 20 % de son objectif).

En réalité, les politiques migratoires, et pas seulement le mécanisme de relocalisation, sont révélatrices du comportement des États membres vis-à-vis de l’Union européenne car cela touche leurs compétences régaliennes. Nos chefs d’État et de gouvernement font porter la responsabilité des dysfonctionnements sur les institutions européennes et mettent en cause l’espace Schengen ou le règlement de Dublin. Mais qui les a signés ? Qui les met en œuvre ? Qui assure le contrôle aux frontières, sinon eux ? Comment peuvent-ils encore se gargariser des valeurs européennes quand ils ne sont pas capables de solidarité vis-à-vis des pays qui sont en première ligne et pire, qu’ils n’hésitent pas à refouler les demandeurs d’asile potentiels vers ces États ? C’est exactement ce que fait la France à la frontière italienne, au mépris du droit européen notamment pour les mineurs isolés et plus largement des conventions internationales.

LVSL – Là encore, la sémantique est importante. Pour justifier leur politique, les États font souvent une différence entre “migrants économiques” et “réfugiés”… 

Marie-Christine Vergiat – Il y a beaucoup d’hypocrisie sur ces sujets. La Pologne en est l’un des exemples les plus symptomatiques. Ce pays a été l’un des plus virulents contre le mécanisme de relocalisation. Or, c’est celui qui accueille le plus de migrants économiques sur son territoire. En 2016, il a délivré 494 000 titres de séjour liés à l’emploi, soit 58 % des titres délivrés pour ce motif dans l’UE, et à 87 % au bénéfice d’Ukrainiens. C’est donc du dumping social et cela démontre l’absurdité de l’opposition entre réfugiés et migrants économiques. Les États sont toujours libres d’accorder ou non le droit d’asile ou de délivrer des titres de séjour. C’est pour cela que de grandes différences existent entre les États tant en ce qui concerne la nationalité des ressortissants concernés que le taux d’acceptation de ces demandes.

C’est pourtant typiquement un sujet où la solidarité entre les États membres devrait prendre tout son sens en tenant compte de la population, des capacités économiques (PIB et taux de chômage) et des efforts faits par ailleurs pour accueillir migrants et réfugiés, et c’est plus ou moins ce qui avait été proposé dans le mécanisme de relocalisation.

Les institutions européennes deviennent un exutoire dans ces pays qui surfent sur le nationalisme, ce qui ne les empêche pas de bénéficier largement des fonds européens. C’est peut-être là-dessus qu’il aurait fallu jouer pour que l’Union européenne ne soit pas encore un peu plus un espace à géométrie variable où chacun fait son marché en fonction de ses intérêts nationaux.

LVSL – L’Union européenne met de plus en plus en place une politique d’externalisation de la gestion de ses frontières. La conséquence de cette politique est parfois une collaboration avec des régimes politiques dictatoriaux, je pense en particulier au Soudan et à la Libye. Vous vous êtes récemment rendue au Soudan et aux frontières de la Libye. Comment jugez-vous cette politique ?

Marie-Christine Vergiat – Il faut rappeler en préalable que nous sommes dans le domaine de la politique étrangère et que c’est le Conseil, et donc les États membres, qui sont les seuls réels décideurs.

La politique dite « d’externalisation des frontières » existe depuis longtemps et notamment depuis 2006 quand, dans le prolongement de la construction des barrières de Ceuta et Melilla, s’est conclu à l’initiative principalement de l’Espagne et de la France un « accord » avec le Maroc et les pays d’Afrique du Centre et de l’Ouest appelé « Processus de Rabat », qui fait des États concernés les gendarmes de nos frontières. Cet accord a peu à peu trouvé ses limites puisque les pays concernés et notamment ceux du bord de la Méditerranée se sont transformés de pays d’émigration en pays d’immigration.

“Au Soudan, la frontière nord du pays est contrôlée par les « Forces d’action rapide soudanaises » dans lesquelles ont été intégrés les ex-Janjawid, principaux auteurs des massacres au Darfour. En Erythrée, souvent appelée la Corée du nord de l’Afrique, on prétend former les gardes-frontières alors que ceux-ci tirent sur celles et ceux qui tentent de franchir la frontière. De qui se moque-t-on ?”

Le processus de Khartoum a donc pris le relai.  Il a été enclenché sous Présidence italienne au 2ème semestre 2014 principalement avec les pays de la Corne de l’Afrique. Pourquoi ? Parce qu’à l’époque, en dehors des Syriens, l’essentiel de celles et ceux qui traversaient la Méditerranée venaient de ces pays de la Corne de l’Afrique où sévissent misère, famines, guerres et dictatures. C’était aussi celles et ceux dont le droit d’asile était le plus facilement reconnu. Le fait même que ce « processus » porte le nom de Khartoum, la capitale du Soudan dont le principal dirigeant est sous le coup de deux mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale, est tout un symbole. Rien ne semble arrêter désormais les dirigeants des pays européens pour tenter d’empêcher des hommes, des femmes, des enfants de rejoindre l’Europe pour y demander l’asile.

Au Soudan, la frontière nord du pays est contrôlée par les « Forces d’action rapide soudanaises » dans lesquelles ont été intégrés les ex-Janjawid, principaux auteurs des massacres au Darfour. En Erythrée, souvent appelée la Corée du nord de l’Afrique, on prétend former les gardes-frontières alors que ceux-ci tirent sur celles et ceux qui tentent de franchir la frontière. On prétend aussi faire des campagnes d’information pour dissuader les migrants de « risquer leur vie » pour venir en Europe. De qui se moque-t-on ? Ces politiques sont avant tout destinées à l’opinion publique européenne ou à ce que nos dirigeants pensent être cette opinion publique, afin de tenter de démontrer qu’ils agissent y compris pour mettre fin au carnage en Méditerranée. En réalité, ils font le contraire car non seulement ils n’empêchent pas les réfugiés de fuir mais ils ponctionnent les politiques de développement pour financer ces politiques sécuritaires. Tel est exactement l’objet du fonds fiduciaire pour l’Afrique créé lors du Sommet de La Valette en novembre 2015.

En Libye, c’est encore plus dramatique. D’un côté, l’Union européenne discute avec le GNA, seul gouvernement reconnu internationalement, et prétend former les gardes-frontières libyens alors que ce gouvernement ne contrôle qu’environ 15 % du territoire et de l’autre, l’Italie « dialogue »  avec les milices libyennes dans une vision court-termiste qui ne peut que nuire aux tentatives de stabilisation du pays menées notamment sous les auspices des Nations Unies.

Loin de produire les effets escomptés, ces politiques donnent au contraire une légitimité internationale à des dictateurs et affaiblissent les actions contre eux. Je condamne donc totalement ces politiques inefficaces, dangereuses et indignes de pays qui continuent de se gargariser des droits de l’Homme.

LVSL – Pour expulser il est théoriquement nécessaire que l’État de renvoi ait signé un accord de réadmission avec le pays d’expulsion. Le rôle de la France dans la négociation de ces accords de réadmission est assez trouble. L’Union quant à elle tente d’établir une liste de pays dits « sûrs », la Turquie ou encore le Kosovo faisant partie des propositions de la Commission. À terme cette liste devrait se substituer aux listes établies par chaque État membre. Faut-il le craindre ?

Marie-Christine Vergiat – La Gauche unitaire européenne, groupe au sein duquel je siège, est par principe hostile à tout accord de réadmission, notamment parce qu’ils empêchent en pratique un examen individuel des demandes d’asile et facilitent les expulsions tant de migrants en situation irrégulière quelle que soit la façon dont ils sont entrés sur le territoire que, de plus en plus, de déboutés du droit d’asile.  Or, j’ai déjà souligné les différences entre États membres en ce qui concerne le droit d’asile. Et donc, a minima, il ne devrait pas y avoir d’accords de réadmission européens tant qu’il n’y aura pas de droit d’asile au même niveau.

Tout demandeur d’un pays dit sûr risque de voir sa demande d’asile en fait, sinon en droit, rejetée automatiquement via des procédures accélérées. C’est donc contraire à la Convention de Genève qui établit un examen individuel de toutes les demandes.”

Ces accords ne sont pas une condition indispensable aux expulsions mais visent à les faciliter vers les pays avec lesquels ils ont été signés. Ces accords sont de plus en plus informels et échappent à tout contrôle démocratique, notamment du Parlement européen, et judiciaire. Pire, ils deviennent de plus en plus un préalable à tout accord avec l’Union européenne quel qu’il soit y compris en matière d’aide au développement et servent à faire pression pour les accords de libéralisation des visas. C’est ce qui s’est produit avec la Géorgie et ce qui est en cours avec la Tunisie. On demande aux États d’accepter le retour de leurs ressortissants mais aussi de tous ceux qui ont transité sur leur territoire. Cela rejoint de fait les tentatives de mettre en place des listes de « pays sûrs », qu’il s’agisse de pays d’origine ou de pays dits tiers.

Tout demandeur d’un pays dit sûr risque de voir sa demande d’asile en fait, sinon en droit, rejetée automatiquement via des procédures accélérées. C’est donc contraire à la Convention de Genève qui établit un examen individuel de toutes les demandes. Actuellement, il n’existe des listes de « pays  sûrs » que dans une dizaine d’États membres dont la France. Ces listes sont très différentes d’un État à l’autre. Le projet européen tel qu’établi par la Commission européenne vise effectivement les pays des Balkans occidentaux et la Turquie mais il fait actuellement l’objet d’un débat entre les différentes institutions européennes, notamment pour que la liste européenne se substitue aux différentes listes nationales. Il va de soi que compte tenu de la situation actuelle en Turquie, ce pays pose à lui seul problème, car l’intégrer sur la liste des pays sûrs reviendrait à accepter les violations des droits de l’Homme et plus largement de l’État de droit qui y ont actuellement lieu, mais c’est bien la continuité de l’accord UE/Turquie de mars 2016 et plus largement de l’élargissement des politiques d’externalisation des frontières.

LVSL – Vous avez été l’auteure d’un rapport du Parlement européen en octobre 2016 intitulé « Droits de l’Homme et migrations : quel rôle pour l’UE dans les pays tiers ? ». Vous y pointez le non-respect des droits fondamentaux des migrants, en particulier la liberté de circulation et le droit d’asile, et de la convention de Genève. Ne pensez-vous pas qu’il soit hypocrite d’exiger des pays tiers un respect des droits fondamentaux que nous avons nous-mêmes du mal à respecter ?

Marie Christinie Vergiat – Ce rapport a d’abord été pour moi l’occasion de contextualiser la question des migrations et de montrer que les pays tiers et notamment les pays dits en développement où se concentrent près de 90 % des réfugiés sont confrontés à des situations bien plus compliquées que celles auxquelles les pays européens doivent faire face. J’ai notamment insisté sur l’évolution des mouvements migratoires en rappelant que désormais les mouvements Sud-Sud, dont 80 % se font entre pays aux frontières communes ayant peu de différences de revenus, dépassent désormais les flux Sud-Nord.

J’aurais aimé que ce rapport soit plus court et concentré sur un certain nombre de problèmes majeurs et qu’il puisse totalement éviter un petit côté donneur de leçon, mais les majorités sont complexes au Parlement européen surtout sur des sujets comme ceux-là.

Nombre de pays dans le monde n’ont aucune législation en matière migratoire ni même de droit d’asile. La notion de frontières n’a pas toujours le sens où nous l’entendons au niveau européen, mais comme je l’ai déjà dit la quasi-totalité des pays du monde sont maintenant des terres d’immigration et devraient donc avoir un minimum de législation pour protéger les migrants qui vivent sur leur territoire. A l’inverse de ce que vous dites, on peut constater que la Convention sur les droits des travailleurs migrants et de leur famille a été signée par une cinquantaine d’États, tous du Sud et aucun de l’UE. Pourquoi ? Parce que cette convention établit que tous les migrants ont des droits quel que soit leur statut.

C’est donc en avançant sur une reconnaissance universelle des droits que l’on fera avancer partout la situation des migrants, en commençant par la reconnaissance d’un droit international à la mobilité qui n’existe aujourd’hui que pour un tiers des habitants de la planète.

La “méthode Collomb”, une politique anti-réfugiés qui ne dit pas son nom

Les migrants accueillis à l’université Lyon II manifestent devant le lieu d’expulsion ©Collectif Amphi C

Alors que le projet de loi sur l’asile et l’immigration va être débattu à l’Assemblée nationale dès février, l’OFPRA a annoncé cette semaine qu’un nombre record de demandes d’asile a été enregistré en 2017, avec plus de 100 000 requêtes. Nul doute que ces chiffres vont être instrumentalisés dans la négociation par avance houleuse du projet de loi. Et inutile de dire que la politique prévue par le gouvernement semble balayer toute approche humaniste de la question.

 

Une politique répressive

Le projet de loi sur le régime d’asile européen et la circulaire du ministre de l’ntérieur Gérard Collomb illustrent en effet la stratégie gouvernementale, qui consiste essentiellement à renforcer la législation répressive contre les migrants. La circulaire du 13 décembre somme les préfets d’augmenter le nombre d’éloignements forcés, avec la mise en place d’équipes mobiles chargées de contrôler les situations administratives dans les centres d’hébergement d’urgence, ce qui signifierait l’intervention policière sans décision de justice et la transmission à l’Etat de données individuelles.

La future loi sur le régime d’asile européen a quant à elle pour objectif de permettre l’accélération des procédures en effectuant un tri systématique des migrants arrivant sur le territoire : elle prévoit en ce sens la rétention en centre des migrants dublinés, mais également l’allongement de la durée de rétention des migrants en attente d’expulsion. Elle est dénoncée par le défenseur des droits Jacques Toubon comme permettant de priver de libertés les demandeurs d’asile.

Des dénonciations multiples

Cependant, la vision binaire que porte le gouvernement, distinguant “bons” et “mauvais” migrants, se heurte à l’indignation de la société civile, notamment avec la dénonciation remarquée du projet de circulaire Collomb par 19 associations le 20 novembre dernier. Ces associations ont saisi le 10 janvier le juge des référés du Conseil d’État contre les circulaires “hébergement d’urgence” et seront à nouveau reçues par Edouard Philippe le 11 janvier.

Les associations dénoncent la volonté de mettre en place un contrôle discriminatoire et systématique au sein de lieux indépendants de l’État. La mise en place de cet inquiétant arsenal répressif est pointée du doigt au sein même de la majorité : en témoigne la question de la députée Sonia Krimi (LREM) dans l’hémicycle le 19 décembre, qui assimile la circulaire à une série de “caricatures simplistes et cyniques“. En réponse, le ministre de l’intérieur se contente de citer des statistiques, conformément à la politique du chiffre qu’il souhaite mettre en place. Une position qui tend de plus en plus à diviser au sein de la majorité : le député LREM Jean-Michel Clément a pour sa part exprimé mardi 9 janvier sa volonté de mettre en place un groupe de frondeurs.

Lyon, laboratoire de la “méthode Collomb”

Pour avoir un aperçu alarmant de ce à quoi peuvent mener les prérogatives du ministre de l’intérieur, il suffit de jeter un œil à la gestion migratoire de la ville de Lyon, dont Gérard Collomb a été maire de 2001 à 2017, et qui illustre déjà cette logique de criminalisation des migrants. Ainsi, il avait décidé durant l’été caniculaire 2016 de couper stratégiquement l’eau potable de fontaines publiques  pour éviter qu’elles ne deviennent des lieux de regroupement de sans-abris et donc que ceux-ci soient visibles des touristes.

Une volonté méthodique de cacher les migrants, également mise en oeuvre lors de la venue du président de la République à Lyon début septembre, lorsque la police avait ordonné la dissimulation du camp de l’esplanade Nelson Mandela par laquelle passait le convoi présidentiel. La politique locale se mue en nationale lorsque Gérard Collomb est nommé ministre de l’Intérieur : ainsi justifiera-t-il les lacérages de tentes et autres violences policières dans la Jungle de Calais par une volonté de ne pas “créer un appel d’air” conduisant les migrants à “s’enkyster”.

Face à cette politique, des étudiants se sont récemment mobilisés à l’université Lumière Lyon II, accompagnés de professeurs et personnels administratifs, se substituant ainsi à un État qui manque à ses devoirs d’accueil inconditionnel de toute personne en situation de détresse. Une cinquantaine de migrants – dont des mineurs et des familles – ont été accueillis et pris en charge dans une aile du campus. L’occupation se voulait dénonciatrice du déni du droit commun et du recours normalisé aux expulsions dont font preuve les autorités. Malgré la mobilisation associative et médiatique provoquée par l’occupation de « l’amphi C », le préfet du Rhône Stéphane Bouillon a refusé l’ensemble des revendications du collectif. La décision de justice rendue le 14 décembre exige une expulsion de la faculté avec recours aux forces de l’ordre. Cette réponse est emblématique du recul des droits fondamentaux annoncé dans le cadre de la réforme migratoire en chantier. Depuis, le collectif a réquisitionné et occupe toujours un bâtiment vide, propriété de la métropole. A l’intérieur, un lieu de vie décent pour les migrants tente de s’organiser faute de proposition de logement étatique, alors même que la Fédération Française de l’Immobilier estime que 3 millions de logements sont actuellement inoccupés.

Ce type de mobilisations ayant recours à l’occupation se répand dans de nombreuses villes françaises comme Grenoble ou Nantes. L’action citoyenne, qui répond dans un premier temps à l’urgence solidaire, se veut également lutte politique. Une résistance qui s’organise malgré la volonté de criminaliser cette solidarité. Martine Laudry, militante d’Amnesty International, a par exemple été jugée ce lundi 8 décembre au tribunal correctionnel de Nice pour “délit de solidarité”, pour avoir accompagné deux migrants mineurs isolés à la police aux frontières, afin de faire valoir leurs droits.

L’instabilité politique, la violence sociale et la précarité économique sont autant de facteurs de migration qui ne peuvent être hiérarchisés en dehors de toute considération contextuelle. Le phénomène de migration est souvent évoqué à tort comme un tout, homogène, dans lequel l’individu est effacé. William Lacy Swing, directeur de l’IOM, organisme de l’ONU chargé des migrations, dénonçait au contraire le 15 décembre le fait que « nous vivons une époque dans laquelle une élite privilégiée considère la mobilité presque comme un droit de naissance ».

Une “victoire politique du Front national” ? 

La posture extrêmement répressive du gouvernement en matière de politique migratoire a d’ailleurs été saluée par l’extrême-droite, par le biais de Louis Aliot sur BFM-TV, et même à travers un communiqué de presse du parti, célébrant une  “victoire politique du Front national”. Un soutien de poids qui semble embarrasser Gérard Collomb, exprimant dans la presse son incompréhension d’être perçu comme « facho de service ». Ce qui ne l’empêche pas de disqualifier les associations d’aide aux migrants, en rappelant que “l’extrême gauche, ne l’oublions pas, ce sont des millions de morts en URSS” …

Le caractère personnel de la gestion présidentielle de la politique migratoire est particulièrement révélateur d’un autoritarisme d’État alarmant : “Je ne peux pas donner des papiers à tous les gens qui n’en ont pas” avait-il ainsi répondu à une demandeuse d’asile le 21 novembre.

Pensée complexe ou double-discours ?

La ligne politique de gestion migratoire dans laquelle s’inscrit Emmanuel Macron est en contradiction totale avec les propos qu’il avait précédemment tenus. Ainsi, dans un discours aux préfets en septembre, il dénonçait les « situations indignes de notre pays et de sa tradition d’accueil » qu’amène la non considération de l’urgence migratoire, soulignant l’importance de ne « céder ni à la démagogie, ni aux facilités du quotidien ».

Ces déclarations apparaissent dès lors comme la façade trompeuse d’une réalité de sélection de migrants : les moyens mis en œuvre pour mieux accueillir certains migrants sont corrélatifs à l’exclusion systématique d’autres. Le double discours de Macron tente de justifier cette politique de tri. Ce positionnement biaisé est révélateur de la stratégie gouvernementale, et s’est vu récemment dénoncé par une partie de la gauche dont Benoit Hamon, pour lequel même la ligne sarkozyste en matière de gestion migratoire était davantage tempérée. Une comparaison qui fait la une de Libération ce 12 janvier, le journal titrant : “Tri des migrants : Sarkozy en rêvait, Macron l’a fait”.

“Il n’y a pas aujourd’hui un traitement de faveur pour les migrants en France, c’est vraiment l’inverse” déclarait le directeur des études de la fondation Abbé Pierre le 3 janvier. Après la violence physique du périple, la violence institutionnelle porte déjà et portera encore plus le coup fatal. La déshumanisation du rapport au demandeur d’asile sera d’autant plus flagrante de par la mise en place d’audience avec les magistrats par vidéo-conférence (mesure du projet de loi), une mise à l’écart totale en somme.

Le reniement par le gouvernement des valeurs humanistes au fondement de la République, à travers cette circulaire Collomb et le projet de loi sur le régime d’asile européen, interroge donc. Faut-il y voir une volonté de concurrencer la droite, et notamment Laurent Wauquiez, dans la surenchère identitaire ? En attendant, c’est le FN qui applaudit.

Crédit Photo: ©Collectif Amphi C

Libye : les migrants vendus comme esclaves sont aussi une responsabilité européenne

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De la chute d’un dictateur à aujourd’hui, la Libye n’est pas seule responsable de ce qui se passe sur son territoire. La vente d’esclaves se déroule au milieu d’un chaos migratoire, face auquel la France et l’Union Européenne ne prennent pas leurs responsabilités ; alors même que la situation actuelle résulte d’une guerre déclenchée pour des histoires de pétrole et d’argent (oui, encore).

 

« Ce sera l’honneur du Conseil de sécurité d’avoir fait prévaloir en Libye la loi sur la force », déclare Alain Juppé à l’ONU en mars 2011. Alors ministre des Affaires étrangères et européennes du gouvernement Fillon, il engage l’ONU à voter la résolution 1973. Cette résolution met en place une zone d’exclusion aérienne en Libye. Il s’agit, officiellement, de soutenir le mouvement populaire contre Mouammar Kadhafi dans le contexte du Printemps Arabe. Aujourd’hui, ce n’est pas la loi mais bien la force qui règne en ce qui concerne les réfugiés. Le 14 novembre dernier, CNN rapporte que des migrants sont vendus comme esclaves en Libye.

La journaliste américaine traduit ce qu’elle a pu entendre au cours de la vente, les migrants, nigérians notamment, sont appelés « marchandise ».  Des acheteurs dépensent de 400 à 700 dollars pour obtenir un travailleur qu’ils ramènent chez eux, car ils sont désormais leur « propriété ». Face à cette scène, la journaliste ne trouve plus ses mots.

 

Si la cruauté exposée dans la vidéo laisse la journaliste sous le choc, elle ne peut pas laisser la France sans réaction. Les autorités libyennes vont enquêter et si l’Union Européenne et la France ne participent pas dans la vente d’êtres humains (du moins, on l’espère), la Libye ne s’est pas retrouvée là toute seule.

La France en preux chevalier qui défend la cause du peuple libyen ?

En mars 2011, quand la résolution 1973 est votée à l’ONU, c’est officiellement pour aider le peuple oppressé à se débarrasser d’un dictateur. Or, le 14 septembre 2016 le Parlement britannique publie son rapport d’évaluation de l’action en Libye. Il y est mentionné que l’alliance de la France, la Grande-Bretagne et dans une moindre mesure des États-Unis devait servir à protéger les civils. Cependant, le Parlement britannique souligne que l’été 2016 signe une inflexion, qualifiée d’opportuniste, vers un changement de régime. Non seulement une politique de l’après n’était pas prévue (Barack Obama déclare d’ailleurs dès avril 2016 que ce manque de planification est sûrement la pire erreur de ses huit ans de présidence) mais en plus, les motivations pour l’intervention de 2011 sont plus pragmatiques qu’idéologiques.

Ainsi, si le compte-rendu du Parlement considère David Cameron comme responsable de l’échec de l’intervention, il rappelle le rôle de la France. Il y est noté que les motivations de la France étaient le désir :

  • De posséder une part plus grande du pétrole libyen
  • D’augmenter son influence en Afrique
  • De donner une possibilité à l’armée française de réaffirmer sa puissance dans le monde
  • De s’assurer que Mouammar Kadhafi ne supplanterait pas la France en Afrique
  • Et pour Nicolas Sarkozy de s’assurer des points pour la prochaine campagne présidentielle.

Ces motivations listées dans le rapport peuvent être complétées par l’enquête des journalistes de Médiapart, Fabrice Arfi et Karl Laske. Après six ans d’enquête ils publient le livre Avec les compliments du guide, dans lequel une corrélation est soulignée entre le financement supposé de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy par Mouammar Kadhafi, et une guerre voulue par la France, qui a conduit à la mort du dictateur. S’il faut laisser la justice faire son travail, pour eux il ne s’agirait pas d’une coïncidence.

Conséquences, conséquences…

Depuis le pays est déchiré en différentes factions et le Gouvernement d’Union Nationale (GUN), soutenu par l’ONU, a bien des difficultés à contrôler le pays. C’est pourtant avec ce gouvernement que l’Union Européenne a signé un accord, afin de financer ses garde-côtes. En effet, l’Italie se trouve débordée face aux migrants qui cherchent refuge en Europe et qui pour cela tentent leur chance par la Méditerranée, direction les côtes italiennes. Le départ se fait massivement par la Libye, pays peu contrôlé. L’Union Européenne n’a pas été solidaire ces dernières années et l’Italie s’est retrouvée seule. La solution trouvée est donc de financer les garde-côtes libyens, pour qu’ils empêchent les embarcations de quitter leurs eaux territoriales. Or, selon une vidéo publiée par infomigrants.net le 16 novembre, certains migrants affirment qu’une fois récupérés par les garde-côtes, le trafic d’hommes commence directement dans les prisons où les vendeurs d’esclaves viennent les chercher.

Pour rappel en 2016 la France a accepté 26 499 nouvelles demandes d’asile sur les 85 726 déposées, soit environ 30%, selon les chiffres du Ministère de l’Intérieur. Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés estime que la Turquie accueille cette année 2.9millions de réfugiés sur son territoire, soit plus que l’Europe entière qui culmine à 2.3millions de réfugiés sur son territoire.

Sources et références :

Compte-rendu de réunion au Conseil de sécurité de l’ONU, 17 mars 2011 : http://www.un.org/press/fr/2011/CS10200.doc.htm

Vidéo de CNN et article : http://edition.cnn.com/2017/11/14/africa/libya-migrant-auctions/index.html

Rapport du Parlement britannique : https://www.parliament.uk/business/committees/committees-a-z/commons-select/foreign-affairs-committee/news-parliament-2015/libya-report-published-16-17/

Infomigrants.net vidéo sur les garde-côtes : http://www.infomigrants.net/fr/post/6102/libye-une-journaliste-americaine-reussit-a-filmer-une-vente-aux-encheres-de-migrants

Chiffres du Ministère de l’Intérieur : https://www.immigration.interieur.gouv.fr/Info-ressources/Etudes-et-statistiques/Statistiques/Essentiel-de-l-immigration/Chiffres-clefs/LES-PRINCIPALES-DONNEES-DE-L-IMMIGRATION-EN-FRANCE

Rapport du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés : http://www.unhcr.org/statistics/unhcrstats/5943e8a34/global-trends-forced-displacement-2016.html

Si vous avez des questionnements philosophiques sur la notion de responsabilité, allez feuilleter Against Purity: Living Ethically in Compromised Times par Alexis Shotwell.

Crédits photos :

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